Comment la foncière tertiaire d’Icade a-t-elle vécu cette année 2021 et quels sont les chiffres essentiels à retenir ?

En 2021, la foncière tertiaire d’Icade a enregistré 343,9 millions d’euros de revenus locatifs, soit une progression d’1,2 % par rapport à 2020 (339,9 millions d’euros). Nous avons effectué un certain nombre de cessions au cours des deux dernières années, ce qui est autant de manque à gagner en terme de collecte de loyers. Néanmoins, malgré cette stratégie de cessions, nous sommes parvenus à faire progresser notre flux locatif grâce à la location de nouveaux actifs, ainsi que de nombreux développements et acquisitions. En 2021, nous avons ainsi livré, pour un investissement total de 450 millions d’euros réparti sur plusieurs années, quatre nouvelles opérations d’envergure (louées pour certaines à 100 %) et le loyer retiré de ces nouveaux actifs compense le loyer perdu à la suite des cessions réalisées. Il est aussi à noter que le plan de cessions s’établit à 507 millions d’euros cette année, une somme réinvestie dans le développement de nouveaux actifs ou la restructuration d’immeubles déjà présents dans notre portefeuille.

Nous avons comme objectif de créer de la valeur sur les biens que nous possédons ; en 2021, notre potentiel de création de valeur grâce à nos développements a atteint 232 millions d’euros. En parallèle, nous avons aussi acheté, dans le cadre de notre stratégie d’acquisitions opportunistes, trois immeubles pour 243 millions d’euros ; l’un se situe à Nanterre-Préfecture (92), les deux autres au Plessis-Robinson (92), entièrement occupés par l’entreprise Renault. L’immeuble de Nanterre est actuellement loué au ministère de l’Intérieur et nous tablons sur son départ prochain du bâtiment pour préparer un programme conséquent de restructuration, afin de repositionner cet actif sur le marché à de nouvelles valeurs locatives plus premium. Encore une fois, cela répond à notre volonté de créer de la valeur. Concernant les campagnes de travaux, elles dépassent les deux millions d’euros du mètre carré, mais nos rendements sur investissement dépassent, malgré tout, les 10 %.

Enfin, nous investissons également sur nos réserves foncières. Pour résumer, notre métier s’articule autour de trois axes : la rotation du portefeuille via les cessions/acquisitions, le développement via la création de valeur et, enfin, l’asset management, à savoir notre activité locative sur le patrimoine existant. Pour ce troisième axe, nous avons renouvelé des baux représentant une surface totale de 184 000 m2, pour une valeur de 250 millions d’euros de loyers. Nous avons la volonté de pérenniser nos collaborations avec le maximum de locataires.

Quelle part représente le pipeline de développement ? Quels projets majeurs comptez-vous développer en 2022 ?

Il équivaut à moins de 10 %, avec des projets lancés qui totalisent 900 millions d’euros, sur un patrimoine global de 8,3 milliards. Nous voulons que notre activité de développement reste toujours inférieure en valeur à 10 % de notre portefeuille. Nous ne nous lançons pas dans des opérations trop ambitieuses afin de limiter la prise de risques et le besoin en capitaux. C’est une règle de prudence que nous nous sommes fixée, d’autant plus sur un marché incertain quant à sa capacité d’absorption en terme d’espaces de bureaux.

Nous disposons, dans notre pipeline de développements, de beaux projets, à l’image d’ »Eden », un immeuble situé à Nanterre Préfecture, comprenant 30 000 m2 de bureaux déjà pré-loués à plus de 50 % par Schneider Electric afin d’y installer son siège social. Le permis de construire est en cours d’instruction et les travaux devraient démarrer avant la fin de l’année, pour une livraison programmée début 2025.

Nous ne nous concentrons pas uniquement sur Paris, bien que nous soyons à l’origine un acteur francilien. Nous lançons aussi des projets en régions, notamment au sein des grandes métropoles. C’est une stratégie payante, car les régions ont été bien plus résilientes que Paris dans ce contexte de crise sanitaire ; les demandes placées à Lyon et Marseille sont restées exceptionnelles, les investisseurs sont très intéressés par les actifs qui y sont présents. Nous lançons trois projets en centre-ville de Lyon (69) et Marseille (13), dont l’un au sein du quartier de La Part-Dieu et les deux autres dans la cité phocéenne. Nous lançons ces opérations « en blanc », comme « Eden » d’ailleurs.

Vous avez manifestement comme ambition de vous développer en régions en fonction des opportunités rencontrées. Cette « mode » pour les régions est de plus en plus observable. Pensez-vous que cela soit conjoncturel ou qu’au contraire, ce phénomène peut être durable ?

Je pense que c’est réellement conjoncturel. La preuve : nous avons assisté, en 2021, à un vrai redressement du marché francilien. La demande placée a largement progressé par rapport à 2020, avec +32 %. Il est clair que le début de la crise, dès mars 2020, a eu un impact plus fort en Ile-de-France qu’en régions. Cela s’explique en grande partie par une recherche d’économies, les loyers de province étant excessivement moins élevés que ceux ayant cours en région parisienne. Cependant, cette tendance à aller s’installer en province ne va pas aller en s’accentuant. Les marchés proposant une offre de qualité vont continuer à être attractifs, mais ça ne représente qu’une petite partie de la province. A Paris, il est probable que le tertiaire retrouve son niveau de 2019 dès l’année 2023, avec 2,3 millions de mètres carrés commercialisés. Une prime sera donnée aux nouveaux immeubles bien aménagés, vertueux d’un point de vue environnemental. L’ancien va rencontrer plus de difficultés, c’est une certitude.

Concernant l’aménagement des nouveaux bureaux, les sociétés ont aujourd’hui besoin d’une très grande diversité de typologies d’espaces. Dans un contexte de fort recours au télétravail, les collaborateurs reviennent au bureau pour voir les collègues, travailler en équipe, mais aussi se concentrer au calme. Ainsi, chaque salarié doit avoir à disposition tous types d’espaces répondant à son aspiration et besoin du moment.

Que pouvez-vous dire au sujet de votre engagement RSE ? A quel point le respect de ces critères environnementaux est-il indispensable aujourd’hui ?

Chez Icade, cet engagement remonte à plusieurs années. Dès 2015, nous nous étions fixés des objectifs à 2025-2030, afin de s’aligner sur la trajectoire d’1,5 degré et pouvoir prétendre au zéro carbone à horizon 2030. Depuis six ans, nous avons déjà réduit de 30 % notre empreinte carbone sur le tertiaire. Nous avons toujours été précurseurs sur ces questions. D’ailleurs, nous avons été classés en première position des entreprises responsables d’un point de vue RSE (classement Le Point-Statista 2022, ndlr). Nous essayons de conserver une longueur d’avance sur la réglementation, d’aller au-delà de ce qu’elle impose. Il faut avoir en tête que presque tous nos locataires sont sensibles à ces problématiques, tout comme leurs collaborateurs.

Emmanuelle Baboulin (Icade) : "nous voulons pérenniser nos collaborations avec le maximum de locataires"