Le scandale Evergrande, en Chine, n’était-il que le prélude à une série de révélations de fraudes en cascade ? L’Europe est, en tout cas, à son tour éclaboussée, par le truchement du réputé très rigoriste marché allemand.

L’affaire démarre le mercredi 6 octobre 2021, lorsque Viceroy Research, connu pour ses enquêtes à charge menées pour faire la lumière sur les pratiques douteuses des grandes entreprises, cible sans détours le groupe immobilier Adler, qui est intégré au Dax 40 allemand (équivalent de notre Cac 40). Ce dernier serait un « foyer de fraude, de tromperies et de fausses déclarations financières visant à cacher sa véritable situation financière ». La note publiée par Viceroy Research va plus loin, ne lésinant pas à employer l’anathème pour jeter le discrédit sur Adler, qui serait un « repère de voyous », où « des administrateurs fantômes et associés » peuvent « s’enrichir systématiquement » grâce à une série de « montages opaques »…

La réaction ne s’est pas faite attendre, l’effet domino se mettant en branle sitôt les accusations parvenues aux oreilles des investisseurs : dans la journée, le titre Adler Real Estate AG dévisse en Bourse, à -30 %. Dans la foulée, la BaFin, le gendarme financier allemand (équivalent de Tracfin chez nous), promet de faire la lumière sur cette affaire, quitte à saisir le parquet compétent en cas de soupçons avérés. Il faut dire que la BaFin n’a pas toujours été exemplaire dans son action, et a même été vivement critiquée dans sa gestion de l’affaire Wirecard, du nom d’un fleuron de la fintech spécialisée dans les paiements en ligne et qui est aujourd’hui en liquidation judiciaire. L’année dernière, il avait été reproché à la BaFin de faire preuve de lâcheté vis-à-vis de Wirecard et de ne pas agir en conséquence des faits graves et avérés qui lui étaient reprochés. L’affaire avait semé un tel trouble que la Chancelière Angela Merkel en personne avait dû se défendre de tout traitement de faveur réservé par l’Etat allemand à l’endroit de Wirecard.

Vonovia à la rescousse

Cette fois-ci, la BaFin compte bien mener ses investigations à leur terme,et décider de sanctions fermes si les accusations se révélaient être réelles. Cependant, Adler peut compter sur le soutien inespéré et bienvenu de l’un de ses principaux concurrents sur le marché de l’immobilier allemand, le groupe Vonovia. Dès vendredi matin, soit deux jours après les révélations, Vonovia a accordé un prêt de 100 millions d’euros à Aggregate Holdings, premier actionnaire du groupe Adler. En échange, il a obtenu une option d’achat d’environ 13 % d’Adler, dont le prix est de 14 euros par action. Un pari audacieux, lorsque l’on sait que l’entreprise aux 70 000 logements à travers l’Allemagne a vu son cours en Bourse décrocher de 50 % en septembre, donc avant le scandale de la semaine dernière…

Quelle est la stratégie de Vonovia ? Si le groupe assure qu’il souhaite aller à la rescousse d’Adler pour éviter sa chute et un effet de contagion sur l’ensemble du marché immobilier national, il est permis de penser que l’appétit de Vonovia n’est peut-être pas rassasié par la récente acquisition de Deutsche Wohnen…

Allemagne : le groupe immobilier Adler suspecté de fraude