Tous les cinq ans, le logement figure parmi les sujets incontournables de l’élection présidentielle. Il faut dire que c’est un puissant générateur de frustrations pour les Français : le coût du logement a augmenté plus rapidement que les salaires ces dernières décennies, contraignant les gens “normaux”, les travailleurs des “classes moyennes” indispensables au fonctionnement de nos villes, à vivre dans des logements toujours plus éloignés des centres urbains et des bassins d’emploi, et dont la qualité décroît.

Face à ce défi, le débat se focalise sur l’accession à la propriété et sur le logement social. Tous deux indispensables, évidemment, mais insuffisants pour répondre aux besoins de la part de population qui ne peut ou ne souhaite ni se tourner vers le parc social, ni devenir propriétaire. Ces locataires privés représentent environ un tiers de la population des villes et il est impératif de leur faciliter l’accès au logement sans réduire leur confort de vie.

Les dépenses liées au logement grèvent le pouvoir d’achat des locataires

Pour atteindre cet objectif, prenons du recul sur l’équation et observons que les loyers ne sont pas la seule cause de la cherté du logement. Charges locatives, assurance habitation, énergie, internet, électroménager, petit entretien… sont autant de dépenses contraintes qui s’ajoutent au loyer faisant gonfler le budget total du logement pour les ménages.

La question n’est pas anecdotique : dans l’agglomération parisienne, le coût total d’un deux pièces représente, une fois les dépenses contraintes réintégrées, 52 % du revenu médian d’un ménage de deux personnes (sources : Insee, Observatoires des Loyers, Clameur et calculs Curiosity is Keys). On est loin de la sacro-sainte règle du loyer censé ne pas dépasser un tiers du revenu.

Ces dépenses contraintes pèsent tant sur le pouvoir d’achat des ménages qu’elles pourraient même expliquer en partie pourquoi les classes moyennes ont le sentiment qu’il baisse alors que toutes les études économiques prouvent le contraire ! Comme l’a montré le think-tank Terra Nova fin 2021, le pouvoir d’achat est d’abord vécu comme “le volume de dépenses librement arbitrables” ou, dit autrement, “ce qu’il reste une fois qu’on a tout payé”.

Innover et mutualiser pour réduire les coûts liés au logement

Réduire les dépenses contraintes des locataires devient alors une priorité pour redonner du pouvoir d’achat aux classes moyennes. La part énergétique réduit déjà un peu avec des constructions récentes, de plus en plus économes en énergie, et c’est tant mieux. Mais on peut aller beaucoup plus loin dans la réduction des dépenses contraintes, en saisissant l’opportunité du retour des bailleurs institutionnels sur le marché du logement et en innovant.

En mutualisant les coûts de gestion et d’entretien, un bailleur institutionnel qui détient et gère des logements en bloc dégage mécaniquement des opportunités d’amélioration de la qualité de vie et de réduction de coûts pour ses locataires. Il peut réduire les charges locatives, prendre en charge le petit entretien ou faire disparaître les frais d’agence en travaillant sa stratégie marketing. Il peut équiper les logements de façon pratique et réduire le coût d’un déménagement en intégrant, par exemple, les meubles de cuisine ou de salle de bain et l’électroménager. Il peut proposer des contrats groupés pour l’énergie, internet ou l’assurance habitation à coût réduit pour le ménage. Et il peut même redonner aux urbains le confort de vie qu’ils ne trouvent plus aujourd’hui dans les métropoles, en offrant des espaces partagés de qualité : balcons, terrasses et jardins, chambres d’amis mutualisées, espaces de télétravail…

Nos modélisations, réalisées avec les conseils de pwc et de la London School of Economics, montrent qu’en optimisant la conception et la gestion d’un immeuble de résidentiel locatif, son propriétaire peut espérer réduire de plus de 10 % le budget global du logement pour le locataire. Pour un couple avec un enfant dans un appartement de 55 m2, à Bagneux (92), cela représente un gain de pouvoir d’achat de 100 à 200 euros par mois.

Ces économies, mises bout à bout, produisent des bénéfices tangibles et sensibles pour les ménages de nos villes. Nous avons les moyens de produire un impact positif sur les locataires urbains, à court et moyen terme. C’est pour cela que, de l’investisseur à l’asset manager, du développeur immobilier au property manager, de l’aménageur au promoteur, et des élus locaux jusqu’au futur Gouvernement, il est de notre responsabilité à tous d’innover pour réduire les coûts de fonctionnement du logement et redonner du pouvoir d’achat aux ménages.

Claire Flurin, fondatrice de Curiosity is Keys

Claire Flurin (Keys Reim) : "innovons pour redonner du confort et du pouvoir d’achat aux ménages"