Comment définiriez-vous Vertell et ses activités ?

Il y a un peu moins d’un an, j’ai décidé de fonder ma propre structure d’investissements et d’asset management dans le domaine de l’hôtellerie. L’idée était de créer un acteur capable de réaliser des investissements après avoir sourcé, analysé et structuré des opportunités en allant chercher des financements. Mais aussi de posséder un savoir-faire opérationnel nous permettant de créer de la valeur à travers les opérations. Nous avons un profil d’investisseurs dits opportunistes avec, à la clé, une création de valeur via la réalisation de travaux ou une simple amélioration opérationnelle de gestion quotidienne des hôtels grâce au recours aux outils technologiques.

Quelle est votre stratégie à cet égard ? Garder les actifs sous gestion ou bien les céder dès qu’une bonne occasion se présente ?

Nous travaillons aujourd’hui en joint-venture avec d’autres investisseurs et avons vocation à vendre les hôtels une fois ces derniers restructurés et conformes à ce que nous voulions en faire lors de leur acquisition. Nous n’avons pas vocation à conserver les hôtels indéfiniment. Avec Thibault Catala, mon associé, nous nous complétons assez bien car lui est issu de la partie opérationnelle de l’hôtellerie, avec un vrai savoir-faire en « revenue management » (augmenter et générer plus de revenus dans les hôtels), mais aussi en matière de digitalisation. Il faut savoir que l’hôtellerie est très en retard sur le recours aux outils digitaux, alors même que ces derniers peuvent délester le personnel d’un certain nombre de tâches rébarbatives. Pour nous, cela permet de réaliser des économies d’échelle en permettant aux équipes de se focaliser sur leur métier d’accueil et de service.

Existe-t-il des secteurs de l’hôtellerie que vous visez tout particulièrement ?

Suite au Covid, nous avons identifié le secteur des « resorts » (hôtellerie de loisirs) comme étant très porteur. Cela s’explique par la volonté des Français de partir en vacances à proximité de chez eux, plutôt que de prendre l’avion pour plusieurs milliers de kilomètres, avec la pression des tests Covid ou des certificats de vaccination obligatoires à présenter à la douane. Il faut aussi avoir à l’esprit que la frontière entre business et plaisir tant à se réduire, d’où l’émergence du terme anglais « bleisure ». Le compartimentage n’est plus d’actualité !

Vertell est-il lui-même sur cette stratégie de mélange entre business et loisirs ?

Nous avons quatre hôtels en montage, dont deux qui viennent justement de fermer pour faire l’objet de rénovations lourdes, en conservant ce qui faisait leur force (piscines intérieure et extérieure, salles de jeux, bars, restaurants) tout en y ajoutant des éléments permettant une hybridation entre partie expérientielle et travail.

Combien d’actifs Vertell a-t-il acquis ?

Nous avons acquis « Arenas The Resorts », un groupe hôtelier en Suisse qui détient quatre hôtels, situés à Crans-Montana, Wengen, Arosa et Sils-Maria. Nous avons l’intention d’y faire des travaux qui nous permettront de générer une importante création de valeur. Nous avons aussi l’intention de faire grossir ce portefeuille. Nous sommes particulièrement intéressés par les actifs de montagne, qui constituent un marché de niche jusqu’ici peu pénétré par les investisseurs, peu rénové et géré « à l’ancienne », en famille, avec peu d’outils digitaux utilisés. La marge de progression est donc importante et c’est ce qui nous a séduit.

Le secteur de l’hôtellerie a particulièrement souffert de la crise sanitaire, entre les confinements et les fermetures administratives au public. Croyez-vous en sa résilience totale ?

Oui, l’hôtellerie a souffert de la crise du Covid et ce, dans tous les pays d’Europe. Néanmoins, le gouvernement français a mis en place des instruments de soutien au secteur, à l’image du PGE (Prêt garanti par l’Etat), qui nous ont été d’une grande aide. L’hôtellerie a tenu bon en partie grâce à ces dispositifs. Côté investisseurs, l’appétit pour le secteur est toujours là et ils sont prêts à mettre beaucoup d’argent pour y pénétrer. La seule chose qui pourrait enrayer cette dynamique serait que les banques centrales viennent à remonter leurs taux directeurs de façon significative. Depuis cinq ou six ans, ces mêmes taux sont très bas, voire négatifs, ce qui fait de l’immobilier un marché attractif, avec des nuances en fonction des secteurs ; ainsi, le tertiaire est clairement dans une phase de transition et présente moins de garanties actuellement pour les investisseurs. Il faut avoir à l’esprit que le rendement est le maître-mot pour les investisseurs institutionnels ! Tant que l’hôtellerie, où il y a encore bien plus de demandes que d’offres (les prix n’ont pas baissé !), sera rentable, elle attirera. La vraie difficulté pour l’hôtellerie vient surtout de l’aspect opérationnel, avec une vraie crise de la main-d’œuvre et des recrutements en berne. L’inflation est aussi à surveiller, avec une augmentation des prix de l’énergie et des denrées alimentaires. Pour autant, l’épargne accumulée par les Français ces dernières années est susceptible de créer un « effet champagne », c’est-à-dire des dépenses plus conséquentes dans les loisirs et les vacances.

Romain Semmel (Vertell Asset Management) : « l’appétit pour le secteur de l’hôtellerie est toujours là ! »