Avec 92 700 agréments de logements sociaux enregistrés en 2021 (et des chiffres définitifs qui devraient s’établir en 95 000 ET 96 000), le compte est loin d’être bon : la production HLM est à l’un de ses plus bas niveaux et la tendance devrait se poursuivre. Le taux de réalisation des objectifs varie cependant fortement selon les territoires, avec des départements comme ceux du Centre-Val de Loire qui dépassent leur objectif, tandis que l’Ile-de-France ou la région Paca n’en sont qu’à 70 % de la production prévue. Pourtant, la demande des ménages éligibles est plus que jamais exacerbée, avec près de 2,2 millions de demandeurs inscrits. Un constat inquiétant alors qu’on assiste, dans le même temps, à une baisse de la rotation au sein du parc et d’une diminution de la vacance locative. Cette situation vient, par ricochet, toucher aussi les classes moyennes, les « key workers » qui ne peuvent désormais plus assumer un loyer dans le privé et ne trouvent pas de réponse dans un parc social submergé de demandes. Les bailleurs sociaux voient désormais s’inscrire sur les listes des employés, des ouvriers agricoles, un public qui jusque là pouvait se loger dans le parc privé. « Nous sommes en train de constituer les éléments d’une crise du logement » déplore Emmanuelle Cosse. « S’il n’y a pas de grande mobilisation nationale, je ne crois pas que nous arriverons, avec notre seule bonne volonté, à renverser la tendance ».

Le défi de la rénovation énergétique

La réduction du parc HLM semble donc inéluctable d’autant que les nouvelles obligations de rénovation des logements frappés d’une étiquette G à leur DPE devraient faire sortir du parc un nombre important d’appartements. Cause notamment de cette mauvaise classification, le mode de chauffage, au gaz, qui fait chuter la note : « les pouvoirs publics nous ont poussé à utiliser le chauffage au gaz. Or, ce mode de chauffage fait chuter, avec le nouveau DPE, les logements jusqu’alors classés E ou F » explique Emmanuelle Cosse. Pour rénover et répondre au nouveau DPE, il faudrait engager non pas 5 milliards, mais 7,5 milliards d’euros, correspondant à la rénovation de 150 000 logements. Mais tout n’est pas non plus, en la matière, qu’une question de financement : « rien n’est finalisé pour ce DPE » explique l’USH. « Qu’en est-il, par exemple, du DPE de l’immeuble ? Nous avançons sans savoir ce que sera le texte final ». Autre inquiétude : quid des logements sociaux de fait, ces logements détenus par des bailleurs privés et loués dans le cadre d’une intermédiation ? Nombre d’entre eux, notamment à Paris, devraient, si le nouveau DPE est maintenu en l’état, se retrouver interdits à la location, venant grever davantage encore le nombre de logements.

Un non sujet de campagne

Le sujet ne semble guère, pour l’heure, susciter l’intérêt des candidats potentiels ou avérés à la présidentielle, regrette le mouvement HLM, qui demande à la ministre actuelle de « rester mobilisée jusqu’à l’arrivée du nouveau ministre ». Seuls des candidats se sont exprimés, ceux qui dénoncent le modèle HLM ou la loi SRU. « Certains d’entre eux pensent que c’est bien de dire du mal des HLM car cela plaît, mais ils sont à la remorque de l’opinion publique » considère la présidente de l’USH. En effet, selon un sondage BVA que l’USH s’apprête à diffuser, 56 % des Français ont une opinion favorable des HLM et pensent qu’il faut en construire et en rénover davantage. « Un Français sur deux vit ou a vécu dans un HLM » rappelle Marianne Louis, directrice générale de l’Union qui, elle aussi, met en garde : « le prochain quinquennat connaîtra une crise du logement aggravée par rapport à aujourd’hui ». Les conséquences sur le plan social seront fortes : « la préoccupation numéro 1 des Français, c’est le pouvoir d’achat. Or, dans ce dernier, la question du logement est la première » alerte Emmanuelle Cosse. Pour faire prendre conscience à l’opinion et aux futurs élus, les enjeux, l’USH lance, à partir du 13 janvier, une campagne de communication baptisée « La France a besoin de toits », abordant les questions de pouvoir d’achat, de mixité sociale, de développement économique de tous les territoires, d’égalité des quartiers et d’accession à la propriété. Une série de 4 podcasts intitulée « Bienvenue dans mon HLM » viendra renforcer cette communication en donnant la parole à différents locataires et experts. Le premier épisode sera disponible dès le 24 janvier sur toutes les plateformes d’écoute. Le 9 mars prochain enfin, plusieurs acteurs HLM interpelleront les candidats à la Présidence de la République sur leur programme et leur feront « des propositions concrètes et pédagogiques ».

Le logement social à l'aube d'une nouvelle crise selon l'USH