La crise sanitaire liée au Covid-19 a considérablement affecté l’économie belge. Un confinement général a été imposé à compter du 18 mars 2020 et il affecte particulièrement les entreprises actives dans le secteur immobilier. Le déconfinement a été entamé le 4 mai dernier et se poursuivra par étapes jusqu’au mois de juin au plus tôt.

Retail – Horeca

Tous les magasins et autres espaces clos (tels que restaurants, bars, musées, cinémas…) ont été obligatoirement fermés depuis la mi-mars, à l’exception de certains magasins qualifiés d’essentiels (comme les magasins alimentaires ou pharmacies) et les hôtels (qui ont, cependant, dû fermer leurs espaces de restauration et loisirs). Sous réserve de certains restaurants ayant pu poursuivre une activité de livraison ou « take away » ou certaines enseignes ayant pu poursuivre la vente en ligne, le secteur a été totalement à l’arrêt depuis l’entame du confinement. Beaucoup de locataires n’ont donc eu d’autres choix que de suspendre le paiement de leurs loyers et charges. A l’appui de leur demande, certains locataires invoquent la théorie des risques : comme le bailleur est empêché d’assurer la jouissance paisible des lieux loués (par le fait du prince), le locataire est corrélativement exonéré de ses propres obligations (notamment financières) découlant du bail (le bail étant un contrat synallagmatique). Contrairement à la France, le gouvernement belge n’a adopté aucune mesure d’aide pour permettre aux locataires d’honorer leurs loyers. De plus, un moratoire a été imposé mi-avril 2020 en vertu duquel toutes les mesures d’exécution des créanciers pour obtenir le paiement de leur créances (incl. les arriérés de loyer et charges) sont suspendues jusqu’au 17 juin 2020 si les difficultés de paiement sont dues à la crise sanitaire, ce qui rend provisoirement inefficace l’entame de poursuites judiciaires par les bailleurs.

Dans ce contexte, les locataires et bailleurs doivent trouver une solution amiable pour sortir de l’impasse dans laquelle ils se trouvent actuellement. Les accords sont variés : exonération de toute ou partie du loyer pendant la période de confinement (à l’exclusion des charges qui restent généralement dues), étalement de paiement pour tout ou partie des arriérés, gratuités de loyers accordés pour l’avenir… Cependant, les négociations sont limitées dans la mesure où les baux commerciaux sont régis par une loi du 30 avril 1951, laquelle contient des dispositions impératives auxquelles les parties ne peuvent pas échapper.

Les magasins peuvent rouvrir depuis le 11 mai 2020 (moyennant le respect des règles de distanciation sociale), mais les restaurants, cafés et cinémas restent fermés jusqu’au 8 juin au plus tôt.

Construction

Bien que le gouvernement belge n’ait pas imposé un arrêt des chantiers, la poursuite des chantiers a été rendue, en pratique, plus difficile en raison du respect des règles de distanciation sociale (minimum 1,5 mètre entre deux personnes). De nombreux entrepreneurs invoquent la pandémie comme un cas de force majeure pour suspendre le chantier et décaler, sans pénalités, le délai d’achèvement des travaux. Cependant, il y a lieu de vérifier au cas par cas si l’entrepreneur peut invoquer la force majeure, au regard notamment de la nature des travaux à réaliser et des dispositions contractuelles entre parties.

Urbanisme et environnement

Le virus a eu un effet de « gel » des procédures d’obtention et de recours contre les permis. Les consultations publiques ont été suspendues, les délais ont été prolongés, la temporalité qui se voulait de plus en plus stricte (avec des délais de rigueur et non plus d’ordre) a été mise à mal. Le fédéralisme belge oblige, en outre, à distinguer selon le droit applicable dans chaque région : Bruxelles, Flandre et Wallonie. Des choix différents ont été faits par les instances compétentes.

Ceci étant, les demande de permis sont reçues par les autorités en sorte que le travail de préparation des dossiers « en amont » n’a pas cessé. C’est « en aval » qu’il va reprendre, petit à petit en fonction des possibilités techniques et des disponibilités des services. Le promoteurs doivent donc s’armer de patience, encore plus que d’ordinaire.

Financement

S’inscrivant dans la tendance du dynamisme des marchés immobiliers, les banques ont continué à mettre à la disposition des investisseurs actifs sur le marché immobilier belge des crédits de montants significatifs au cours des premiers mois de 2020. Il est probablement juste de dire que des opérations de crédit ont été finalisées au même rythme que les mois précédents, jusqu’à mi-mars, lorsque le confinement a été imposé en Belgique. A partir de ce moment, un ralentissement important des nouvelles opérations de crédit a pu être constaté sur le marché immobilier.

En effet, dès que le confinement a été imposé, les propriétaires de biens immobiliers et leurs banques ont été confrontés à une série de problèmes et de questions liés au confinement à prendre en compte dans le cadre des contrats de financement existants.

En raison de l’impact de la pandémie sur les activités ordinaires, les entreprises et les commerces en général ont été confrontés à un ralentissement des activités qui s’est traduit par une diminution (importante) du chiffre d’affaire et de l’EBITDA. Par conséquent, de nombreuses entreprises ont été contraintes de discuter avec leur(s) banque(s) de diverses mesures comme, par exemple, le report des remboursements prévus dans le cadre des contrats de crédit existants, un « reset » des covenants financiers et/ou un « covenant holiday ».

De nombreux propriétaires de biens immobiliers ont également été confrontés à ces problèmes, parfois indirectement, du fait que leurs locataires ont dû cesser temporairement leurs activités dans la propriété louée. Des locataires ont contacté des investisseurs pour discuter de l’étalement (voire de l’exonération) des loyers en raison de la crise. Il va sans dire que tout retard dans la perception des revenus locatifs (ou même le fait de renoncer aux paiements concernés) a un impact sur les contrats de crédit conclus par des propriétaires de biens immobiliers.

Le gouvernement fédéral belge a pris diverses mesures pour soutenir les entreprises confrontées à des difficultés financières en raison de la crise du Covid-19. Les mesures de soutien consistent principalement en (i) la conclusion d’une charte avec le secteur financier belge afin d’octroyer aux entreprises financièrement viables un report de paiement de maximum 6 mois des montants dus en vertu des contrats de crédit, et (ii) un « bazooka financier » visant à inciter les banques belges à mettre de nouveaux financements de liquidités à court terme à disposition des entreprises touchées en octroyant une garantie d’Etat pour ces prêts.

Avec la sortie progressive du confinement depuis le 4 mai, l’activité économique commence à reprendre lentement. Contrairement à ce qui est prévu sur le marché des fusions et acquisitions, on s’attend à ce que l’activité sur le marché immobilier redémarre progressivement. A ce stade, on peut s’attendre à ce que les banques soient prêtes à reprendre leur rôle de financeurs externes des transactions immobilières sur le marché belge.

Freya Mareels & Julie De Bonnet (cabinet Liedekerke) : "l’impact du Covid-19 sur l’économie belge"