Quel est votre regard sur l’année qui vient de s’écouler, à la fois en matière de bureau et de résidentiel ?

En immobilier de bureaux, l’expérience de vie sur le lieu de travail est totalement à réinventer. Avec l’avènement du télétravail et de la digitalisation, l’entreprise va devenir une destination ! Un espace à haute valeur ajoutée qui permettra de maintenir le lien social et d’apporter ce que le travail à distance ne peut pas fournir. En conséquence, si une réduction des volumes commercialisés est à suspecter, elle pourrait cependant être atténuée par un réaménagement des espaces au profit des lieux collaboratifs et par une croissance attendue de l’emploi de bureaux. En résumé : « moins de mètres carrés, mais mieux de mètres carrés » !

Concernant le secteur résidentiel, le marché de la construction en France a été impacté en 2020 par deux facteurs : la crise sanitaire et les élections municipales. Ce ralentissement s’inscrivait dans un contexte de réduction des constructions constatée depuis 2018, et notamment liée à la rareté du foncier et à l’augmentation des coûts de construction.

Depuis le 2ème trimestre 2021, nous constatons une reprise du marché. Sur les 12 derniers mois, 430 000 permis de construire ont été octroyés, soit un niveau en hausse de 9 % par rapport à la même période l’année passée. Les mises en chantier ont augmenté de 4 % avec 324 000 logements commencés. Pour autant, si le marché est en passe de retrouver son niveau d’avant crise sanitaire, il reste encore loin du pic observé fin 2017.

Quels ont été les évènements marquants ?

Plus que jamais, la conception immobilière est partie prenante de la valorisation des territoires. Le métier, en pleine évolution, consiste désormais à piloter des projets urbains mixtes, toujours plus intégrés, pour répondre aux nouveaux usages de la ville, aux attentes des habitants et aux ambitions des collectivités locales. C’est, du reste, ce qui a conduit BNP Paribas Real Estate à fusionner ses branches de promotion immobilière tertiaire, résidentiel et grands projets. Parce qu’une organisation intégrée permet de mieux répondre à ces projets dans leur globalité.

L’activité des équipes promotion de BNP Paribas Real Estate a été marquée également par plusieurs lancements de programmes. Nous venons, ainsi, de poser la première pierre de « Gardens », futur siège du Groupe Up de 15 400 m2 à Gennevilliers et de lancer la construction d’« Inspire », premier immeuble de bureaux en structure bois à La Défense. En résidentiel, des projets d’envergure prennent forme tels que O’Mathurins, à Bagneux qui propose 1 800 logements au sein d’un éco-quartier désormais ouvert sur la ville. A Nanterre, aux Groues, nous lançons un programme de logements dont la livraison est prévue au 4ème trimestre 2023.

Nous livrerons d’ici fin 2021 trois immeubles de bureaux, « Métal 57 », à Boulogne-Billancourt, représentant 37 000 m2 (restructuration et extension des anciens ateliers de l’usine Renault signés Claude Vasconi), « Tribequa », à Bordeaux, et notre premier immeuble de bureaux développé en Allemagne, Senckenberg Tower, une tour de 106 mètres de haut, tout en aluminium recyclé. A Milan, nous venons de livrer l’immeuble Horti, un projet extraordinaire de réhabilitation résidentielle qui a remporté, le 12 octobre dernier, « The Plan Award » dans la catégorie « innovation & design ». Je tiens à rappeler également la signature définitive de l’acquisition du siège social et du site de BIC Technologies, basés à Clichy-la-Garenne, en partenariat avec Citallios.

La demande de bureau est-elle aujourd’hui différente d’avant la pandémie ? Si oui, en quoi ?

La crise sanitaire en a fait prendre conscience au plus grand nombre ! Nous voyons la limite des quartiers monofonctionnels, que ce soient des ensembles tertiaires qui ont été désertés pendant le confinement ou des quartiers résidentiels qui ont été, au contraire, sur-occupés. A nous d’innover et d’expérimenter pour réinventer la ville.

Nous sommes entrés dans l’ère du “RE” : REsilience, REhabilitation, REstructuration, REversibilité, REemploi, REnaturation des sols, REgénération… Autant de mots qui doivent être convertis en promesse pour construire un immobilier durable et une ville toujours plus humaine. Pour résoudre au mieux cette équation, nous devons travailler ensemble : acteurs de l’immobilier, acteurs politiques, économiques et associatifs avec, bien sûr, les citoyens au premier plan.

Et qu’en est-il du logement ?

Cette crise réinterroge aussi le rapport au « chez soi». Avec la pandémie, la nécessité pour les résidents d’accéder aux biens essentiels dans leur proximité locale est devenue évidente et l’idée de la ville du quart d’heure, avec des installations et des équipements dans un rayon de 15 minutes autour de chez soi, est devenue une tendance qui convainc de plus en plus. Les quartiers deviennent plus diversifiés, les bâtiments publics et privés s’ouvriraient pour une utilisation à différentes heures de la journée, de la nuit, du week-end… Des perspectives de partage et de mutualisation, jusqu’à l’espace urbain !

Quelle évolution anticipez-vous sur ces deux marchés ?

Si le télétravail s’est fortement développé, il tend à se diffuser progressivement et de manière plus cadrée ; l’application la plus courante varie de un à deux jours de travail à distance. La baisse des volumes commercialisés devrait donc rester maîtrisée car beaucoup d’entreprises envisagent une solution hydride pour répondre aux attentes des collaborateurs convaincus par le « home office », mais également en quête de collectif, de sens et de partage. Parallèlement, la restructuration d’actifs de bureaux, en termes de standards ou de taille, pourrait permettre de limiter la hausse de la vacance et, par conséquent, la baisse des valeurs. Osons donc le dire : le bureau a encore de beaux jours devant lui !
Pour l’immobilier résidentiel, son redémarrage depuis le début de l’année 2021 témoigne de sa bonne résilience. La crise sanitaire a renforcé l’importance d’avoir un logement où il fait à la fois bon vivre et travailler. L’essor du télétravail pourrait redessiner les stratégies résidentielles des ménages, de même que l’arrivée du Grand Paris Express qui constitue déjà un relai de croissance. Les investisseurs ne s’y sont pas trompés et ont recommencé depuis 2020 à investir massivement dans cette classe d’actifs, qui présente même un rendement global supérieur à celui du bureau, avec une volatilité moindre. Cependant, toutes les métropoles et tous les logements ne profiteront pas du dynamisme de ce marché, qui nécessite plus que jamais des fondamentaux solides en termes de localisation, aménités et adaptation aux normes environnementales.

Olivier Bokobza (BNP Paribas Real Estate) : « la conception immobilière est partie prenante de la valorisation des territoires »