Pouvez-vous nous rappeler les fondamentaux d’Inéa ?

Inéa est une société foncière de type Siic (sociétés d’investissement immobilier cotées, ndlr), relativement jeune puisqu’elle a été créée en 2006. Inéa est spécialisée, pour 84 % de son activité, dans l’acquisition d’immeubles de bureaux neufs, situés principalement au sein des dix plus importantes métropoles régionales. Les 16 % restants sont consacrés à la logistique urbaine en zone francilienne. Le « business model » de notre entreprise est l’achat en Vefa (vente en l’état futur d’achèvement, ndlr) d’immeubles neufs auprès de grands promoteurs, qu’ils soient nationaux ou régionaux. Ces immeubles commercialisés ont une valeur bien supérieure à celle à laquelle nous les avons achetés lorsqu’ils étaient encore vides et non aménagés. Notre but est de créer de la valeur et nous nous sommes fixés comme objectif de détenir un portefeuille d’un milliard d’euros fin 2021. Concernant notre positionnement immobilier, le marché des bureaux en régions a plutôt été résilient face aux conséquences de la crise sanitaire ; la demande placée en régions en 2021, c’est-à-dire le nombre de mètres carrés commercialisés sur l’année, est attendue à 1,3 million de mètres carrés. Un volume qui devrait être proche de la demande placée pour Paris et sa région, qui devrait atteindre 1,5 million de mètres carrés. De plus, les régions présentent aujourd’hui un déficit quant à leur offre de bureaux neufs, ce qui rend l’investissement dans ce créneau particulièrement intéressant.

De combien d’actifs se compose le portefeuille actuel d’Inéa ? Pour quelle valeur ?

Au 30 juin 2021, la valeur de notre patrimoine s’élevait à 974 millions d’euros, droits compris. Nous détenons 124 immeubles, répartis sur 71 sites. La surface totale représente 393 000 m2. 82 % de nos bureaux sont situés dans les dix principales métropoles régionales (hors Paris). Lyon, Saint-Etienne et Grenoble représentent, à elles trois, 22 % de notre exposition. Il est aussi à souligner que le taux de vacance de nos immeubles n’excède pas les 8 % et ce taux est rehaussé par les immeubles qui viennent juste d’être livrés et n’ont pas encore eu le temps de trouver preneurs.

Dès votre création, vous avez fait le choix de délaisser Paris, qui est pourtant la plaque tournante du marché de l’immobilier de bureaux en France, pour vous concentrer sur les régions. Était-ce un choix risqué à l’époque ?

Il nous fallait trouver une stratégie d’investissement qui soit nouvelle et non reproduire ce qui avait déjà pu être fait précédemment. C’est aussi une façon de faire face à la concurrence avec des mastodontes qui auront tôt fait de nous écraser. Sur le marché de l’immobilier de bureaux parisiens, beaucoup d’acteurs indétrônables sont solidement installés ; il fallait donc nous différencier. Dès 2006, en discutant avec des promoteurs, nous nous sommes aperçus qu’il y avait une forte attente de bureaux dans les villes de province, avec des rendements intéressants. Nous avons rapidement été convaincus et avons décidé d’orienter la stratégie de la société en ce sens. Au début, on nous considérait avec sympathie et un brin de condescendance, comme si nous étions de gentils utopistes ; à partir de 2017, nous avons atteint un portefeuille de 500 millions d’euros. Aujourd’hui, avec 974 millions d’euros, autant dire que nous ne sommes plus qu’à un jet de pierre d’atteindre notre objectif du milliard. Au cours de la crise, nous avons encaissé nos loyers à hauteur de 99 %. Il faut bien avoir à l’esprit que beaucoup de métropoles régionales sont des pôles universitaires de premier ordre, à l’image de Nantes, Toulouse ou Lyon. Avant, le réflexe de ces étudiants était de « monter à Paris » pour trouver du travail sitôt leur diplôme en poche ; ce n’est plus vrai aujourd’hui, les étudiants d’hier trouvent du travail sur place, sans avoir besoin de rallier la Capitale et cela, les entreprises commencent à très bien le comprendre.

Nous observons un essor du coworking depuis le début de la crise sanitaire. Est-ce une tendance que vous avez également observée en régions ?

La crise n’a été qu’un accélérateur de mutations par ailleurs déjà en cours. Le télétravail, par la flexibilité qu’il permet, va naturellement occuper une place significative au cours des années à venir. Les régions ne sont pas épargnées par les phénomènes qui touchent Paris et de nombreux organismes de télétravail et de coworking y ont également trouvé leur place. Mais si le bureau était hier un espace de convivialité, je pense qu’il deviendra demain un espace de communication et d’échanges. Si l’activité locative ne s’est jamais arrêtée, nous avons noté un ralentissement des grosses locations durant la crise, mais ce marché est en train de reprendre. Les immeubles flexibles, réversibles et divisibles, qui proposent des bureaux partagés et des espaces de communication/échanges, ont la cote et symbolisent ce qui devrait être une tendance qui s’affirme, loin des grandes tours monolithiques du genre que l’on observe à La Défense.

Quels sont les projets d’Inéa ? Quels types d’investissements avez-vous programmés pour les mois à venir ?

Nous restons toujours attentifs au marché et à ses évolutions. Nous communiquerons d’ici à la fin de l’année sur nos projets et notre plan de développement à cinq ans…

Philippe Rosio (Inéa) : "le marché des bureaux en régions a plutôt été résilient face aux conséquences de la crise sanitaire"...