Quels principaux enseignements tirer du marché de l’investissement de bureaux en Ile-de-France tel qu’il s’est présenté en 2021 ?

Les volumes investis en bureaux franciliens subissent une baisse de 22 % sur un an et passent de 16 milliards d’euros à 12,5 milliards. Nous avons déjà eu l’occasion d’évoquer, dans vos colonnes, les raisons de ce résultat, report du Mipim, hésitations quant à la classe d’actifs bureaux, concentration des investisseurs sur « beds and sheds » pour équilibrer les portefeuilles ou coller à la collecte, très thématique en 2021. Rappelons, néanmoins, un phénomène positif : jamais dans l’histoire du marché français (toutes classes d’actifs confondues) le poids des régions n’a été aussi important par rapport à l’Ile-de-France avec 10 milliards d’euros pour les régions par rapport à 15 milliards pour l’Ile-de-France.

Comment voyez-vous évoluer ce marché cette année ?

Malgré les performances décevantes de 2021, le marché immobilier francilien continue de bénéficier de fondamentaux solides et de la ferveur des investisseurs avec de fortes liquidités. Si les taux de rendement « prime » sont historiquement bas pour certaines classes d’actifs comme les bureaux ou les entrepôts, ceux-ci conservent leur prime de risque face aux taux obligataires, qui actent une légère hausse en ce début d’année. A ce stade, nos clients investisseurs, interrogés sur leur vision par rapport à l’inflation, n’envisagent pas de changement de comportement.

Le marché de l’investissement devrait donc connaître un regain de dynamisme en 2022 ; le pipeline de transactions identifiées en cours est nettement plus important qu’il y a un an et les « pitchs » plus nombreux depuis le mois de décembre. Le marché locatif, parallèlement mieux orienté sur le segment des grandes transactions notamment, contribuera à l’apport de nouveaux produits calibrés sur le marché de l’investissement. Nous anticipons, ainsi, une hausse des performances pour 2022 avec des volumes pouvant s’approcher à nouveau des 20 milliards d’euros investis. De notre côté également, notre pipeline d’opérations sous mandats n’a jamais été aussi fourni en début d’année…

Observez-vous une évolution dans la demande des investisseurs, notamment s’agissant du type d’immeubles de bureaux à acquérir ?

L’évolution principale dans le comportement des investisseurs réside dans la plus forte intégration de critères ESG dans leur processus d’acquisition, que ce soit dans l’analyse primaire du dossier ou dans l’exécution de la « due diligence ». Ce sujet passe donc du « nice to have » au « must have » et nous travaillons activement avec nos clients vendeurs pour s’y préparer…

Quelle évolution pour les taux de rendement cette année ?

Les taux de rendement des bureaux devraient rester à leur niveau plancher compte tenu de la concurrence accrue entre les investisseurs. Le taux « prime » du QCA restera, ainsi, stable à 2,50 %, bien entendu toujours pour des actifs « prime » et des volumes liquides.

Quels résultats pour JLL dans ce marché ?

Nous avons réalisé la troisième meilleure année dans notre histoire, avec plus de 6 milliards d’euros d’actifs transactés dans plus de 120 transactions, dont 3 milliards d’euros en Ile-de-France. Les « business lines » résidentiel et logistique ont même réalisé leur meilleur résultat historique !

Aujourd’hui, quelle stratégie de développement dans ce créneau du marché de l’investissement ?

Le mot d’ordre reste croissance puisque notre société dispose d’un bilan solide et a toujours encouragé, dans un esprit entrepreneurial, le développement de nouvelles activités. Nous venons d’ouvrir, deux ans après le département « capital markets » à Lille, « capital markets » Méditerranée, à Marseille, peu de temps après l’ouverture de notre département « leasing markets ». Nous observons également de près le marché pour identifier d’éventuelles opportunités de croissance externe ou de reprise d’équipes…

A ce propos, un mot sur l’équipe ?

Notre volonté de croissance s’exprime, naturellement, en premier lieu sur les recrutements. Nous avons recruté une dizaine de collaborateurs depuis mi-2021, dans toutes les « business lines » et à Paris comme en régions. Et nous continuons à rechercher des profils intéressants, notamment concernant les bureaux, car nous croyons que le bureau comme classe d’actifs en France a encore de très beaux jours devant lui !

Quels nouveaux mandats ?

En matière de bureaux, nous finalisons actuellement la cession d’un immeuble de 20 000 m2 dans le 20ème arrondissement de Paris, « Gambetta Village ». Nous allons lancer, très prochainement, le marketing de deux opérations parfaitement dans la tendance actuelle de recherche de « value add » parisien : un immeuble historique de 7 000 m2 dans le quartier de la Bourse et « Le Messager », un projet de développement dans le 12^ème arrondissement, à proximité de la gare de Lyon. A Levallois-Perret (92), nous sommes mandatés sur l’ancien siège de Cetelem, un ensemble de 20 000 m2 avenue Georges Pompidou.

L’ancien siège de Cetelem, à Levallois-Perret…

En résidentiel, nous travaillons sur deux immeubles emblématiques, l’un situé boulevard de Courcelles, en face du parc Monceau, et un autre dans le 7^ème arrondissement, à proximité du musée Rodin.

Notons, à cette occasion, qu’à Lyon (69), nous sommes mandatés pour la vente d’un magnifique actif « core » loué à Cap Gemini, une Vefa de 6 000 m2 à La Part Dieu, ainsi qu’une partie importante des bureaux dans la tour Crédit Lyonnais.

… « Ivoire », actif « core » loué à Cap Gemini, à Lyon…

En logistique, nous pouvons citer un portefeuille de deux actifs neufs à côté de Roissy, dans le cadre d’un « sale and lease back ». Et en matière de commerce, nous avons mis en vente deux « retail parks », là encore dans la tendance actuelle du commerce en plein air.

… l’un des actifs logistiques neufs à côté de Roissy… (©Michel Blossier)

ou encore un « retail park », à Chambéry (73) : des exemples de nouveaux mandats de vente confiés à JLL…

Un conseil à un investisseur en recherche ?

Comme d’habitude, je propose un conseil aux acquéreurs et un autre aux vendeurs.

Pour les premiers, je réitère ma suggestion de créer des véhicules d’investissement « core + », avec des TRIs (taux de rendement interne, ndlr) de 10/12 %, car c’est par rapport à ce profil de risque que le marché est le plus équilibré entre acquéreurs potentiels et opportunités.

Pour les futurs vendeurs d’actifs de bureaux stabilisés, c’est le moment d’y aller : le marché aujourd’hui ne propose quasiment que des actifs « value add », alors que de nombreux acheteurs « core » demeurent « frustrés »…

Stephan von Barczy (JLL) : « le mot d’ordre reste croissance ! »…