« Cette étude de l’Apur est très attendue cette année car elle permet de mesurer les premiers impacts de la crise sanitaire et les conséquences des différentes épreuves subies par les commerces parisiens depuis ces dernières années (manifestations des « gilets jaunes », grève des transports…) » explique Dominique Restino, président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris. De fait, la crise (les crises) qui ont secoué la Capitale ont considérablement modifié le paysage du petit commerce. Le premier enseignement de l’enquête 2020 est celui d’une baisse du nombre de commerces et services commerciaux : 1 164 établissements en moins entre 2017 et 2020 alors qu’ils étaient restés stables entre 2014 et 2017.

L’arrivée en force du bio

Dans ce contexte, les évolutions constatées lors des éditions précédentes tendent à se confirmer : hausse du nombre de bars et restaurants, du secteur de la santé-beauté et du bien-être ; diminution du nombre des commerces non alimentaires, en particulier le secteur de l’habillement (avec -719 magasins d’habillement, -260 magasins de chaussures et -118 bijoutiers) et des agences bancaires et de voyage. Le nombre de supérettes continue également d’augmenter et cette progression est principalement portée par celles qui proposent une offre « bio », en hausse de 67 % par rapport à 2017. Malgré tout, Paris conserve donc un tissu commercial important, avec une moyenne de 28 commerces pour 1 000 habitants et un total de près de 62 000 (contre 63 259 il y a dix ans). A noter, par ailleurs, que 14 000 commerces appartiennent à un réseau d’enseigne en 2020, 23 % des commerces et 38 % des surfaces de vente.

Hausse de la vacance

Cependant, et alors qu’une nouvelle typologie de commerces se dessine, la vacance des locaux augmente entre 2017 et 2020 puisque l’on recense plus de 900 nouveaux locaux libres en pieds des immeubles parisiens. En 2020, dans tout Paris, 8 760 locaux sont vides, contre 7 850 en 2017. La part de la vacance passe ainsi de 9,3 à 10,5 % entre 2017 et 2020. Lors de l’enquête, parmi les locaux vacants, il a été possible de repérer les locaux en travaux. On en dénombre 1 520, soit 17 % des locaux vacants. En 2017, il n’y en avait que 900, soit 11 % de l’ensemble des locaux vacants de l’époque.

Les craintes sur le devenir des commerces vacants

Afin d’endiguer la baisse des commerces à Paris et de maintenir à flots le secteur, la Ville de Paris a lancé, dès mai 2020, un plan de relance dédié. « Nous avons alloué un budget de 200 millions d’euros pour cela », explique Olivia Polski, adjointe à la Maire de Paris en charge du commerce, « mais cela ne suffira pas et nous ferons davantage ». Et d’ajouter : « mais pour faire repartir le tissu économique de notre territoire, nous avons besoin d’une mobilisation de l’Etat avec un grand plan de relance économique territorialisé ». De manière concrète, des exonérations de loyers pouvant aller jusqu’à huit mois ont été accordées par la Ville à des commerçant louant des locaux aux bailleurs sociaux parisiens afin d’éviter fermetures et baisses des chiffres d’affaires. Olivia Polski a également indiqué que, notamment, des exonérations de droits de terrasses avaient été pratiquées pendant 18 mois et que, en lien avec la Région Ile-de-France, le fonds Résilience avait été abondé de 10 millions d’euros et qu’il le serait de 5 millions d’euros complémentaires. L’adjointe en charge du commerce a, par ailleurs, annoncé la création d’une foncière commerce qui prendra (ou pas) la place de la foncière Paris Commerces créée en 2013, dépendance de la Semaest. Interrogée sur la forme de cette foncière par « Immoweek », Olivia Polski a répondu qu’une « une étude est en cours, depuis janvier 2021, avec la Caisse des Dépôts, pour voir quelle structuration juridique pourrait prendre cette structure. Cette foncière existante rassemblera-t-elle toutes nos actions en matière de commerce et plus – nous souhaitons avoir de nouveaux leviers – ou s’agira-t-il de la création d’une autre foncière, il est trop tôt pour le dire ». Autre inquiétude des élus parisiens : le devenir des commerces vacants. « Dans le centre de Paris, où certains commerces ont fermé, deux craintes se font jour. D’abord, la récupération de commerces pour une transformation en logements meublés dédiés à la location saisonnière (type Airbnb). Nous allons agir, avec Ian Brossat et Ariel Weill (respectivement adjoint au logement et maire de Paris centre, ndlr) pour empêcher que ces locaux « basculent » en location meublée. Ensuite, notre autre crainte est celle qui se fait jour lorsque nous voyons énormément d’acteurs immobiliers qui attendent pour faire, dès que cela sera possible, de la spéculation immobilière. Là aussi, nous resterons vigilants ».

Cette étude de l’Apur, réalisée par Bruno Bouvier, François Mohrt, sous la direction de Stéphanie Jankel, est accessible ici

Olivia Polski (élue Ville de Paris) : inquiétude pour le commerce parisien et création à venir d'une foncière dédiée