L’investissement devrait voir son statut de valeur refuge se confirmer en 2021, dans un contexte de taux bas et de fortes liquidités, encouragé par les banques centrales (en particulier la BCE), l’immobilier confirmant son couple risque/rendement détaché positivement des autres classes d’actifs. Les volumes devraient suivre les scénarii de fin de crise. Le marché du « core » devrait rester fluide avec des corrections de prix inférieures à 5 %, et même à 10 % pour les opérations à valeur ajoutée dans des secteurs sécurisés, mais plutôt entre 15 et 35 % pour les localisations secondaires. L’industriel et la logistique continueront à accueillir les capitaux spécialisés dans la classe d’actifs, tant domestiques qu’internationaux, tandis que le bureau sera marqué par le « flight-to-quality ». Le « retail » confirme son chamboulement déjà amorcé depuis des années, le résidentiel devrait devenir une valeur-refuge et l’immobilier géré et autres actifs alternatifs de véritables sources de création de valeur.

Bureau : pas de retour à la normale avant 2022

2021 sera « une année de transition » pour le bureau, entre hybridation des modes de travail et maîtrise des coûts immobiliers, tiré à hue et à dia entre utilisateurs en quête de flexibilité, y compris pour leurs baux, et des propriétaires qui devront faire preuve d’innovation dans leurs solutions, plus sûres, plus résilientes, plus servicielles. La reprise de l’activité sur le marché francilien dépendra de la vitesse de vaccination et du rebond de l’économie, avec un niveau de commercialisation stable par rapport à 2020 et une certaine amélioration au second semestre, même si le retour à la normale ne sera pas à attendre avant 2022. Les petites et moyennes surfaces, synonymes d’économies et de flexibilité contractuelle, seront plus résilientes que les grands projets ; le bail 3/6/9 fera place à un bond des offres de « coworking » et aux sous-locations. La vacance en Ile-de-France devrait atteindre 7 à 8 %, en moyenne.

Sur les 1,6 million de mètres carrés de projets neufs et restructurés livrés en 2021, plus de la moitié ont été commercialisés ; pour l’offre à venir en 2022-2023, investisseurs et promoteurs continueront à restreindre le volume de projets et les permis de construire. Les loyers faciaux seront orientés à la baisse, entre 5 et 10 %, en premier lieu pour les zones tertiaires où le niveau d’accompagnement des bailleurs est supérieur à 30 % du loyer facial et, sans doute, pour d’autres si l’activité ne se rétablit pas rapidement.

En régions, où la demande placée recule après sept années de croissance, certaines métropoles accusent une baisse de plus de 50 %, tandis que les marchés avec un bassin économique profond, une présence accrue des startups et des secteurs d’activités bien diversifiés se portent mieux. Cependant, dans un contexte de recherche de solutions flexibles, les régions, bien mieux armées qu’en 2008, devraient pouvoir confirmer leur attractivité, même si la tension à l’offre devrait encore perdurer en 2021 avec une légère hausse de la vacance. CBRE tempère : » l’hypothèse d’un risque de sur-offre à court terme, apparaît bien loin, avec un taux de vacance situé à moins de 5 %. Toutefois, des disparités persistent entre les différents marchés. Même si certains sont à l’équilibre ou fluides en terme de disponibilité, d’autres se retrouvent sous tension, plus marquée encore dans les secteurs établis. D’autant plus que cette tension est plus prégnante dans le neuf ».

Logistique, un actif stratégique

La logistique a vu sa place d’actif prépondérant de l’investissement et son fort potentiel sur le long terme être confortés en 2020, en dépit d’un démarrage lent : la tendance devrait continuer, même si cette classe d’actifs demeure tributaire du contexte économique, des indices de confiance des ménages et du climat des affaires ; en effet, la crise a aussi mis en lumière la complexité des chaînes d’approvisionnement sur le plan mondial et la question des produits stratégiques, redessinant d’autant les « supply chains » en cas de relocalisation. L’offre est hétérogène, avec un stock d’offres immédiate de plus de 3,3 millions de m2 et un taux de vacance de 6,7 % ; l’offre prêt-à-démarrer progresse de 14 % en trois mois et l’offre « en blanc » recule de 10 % sur la même période, illustrant la frilosité des développeurs à l’heure actuelle. Les valeurs locatives devraient se maintenir à un niveau très compétitif. Les locaux d’activités voient une accalmie dans la hausse de leurs valeurs locatives et l’intérêt pour ces derniers, notamment en région parisienne, ne pas du tout se démentir.

Commerce : au plus bas pour mieux ralentir ?

Le « retail » a subi le plein coup de la crise, qui était prégnant depuis des années, entre le bouleversement des modes de consommation, des aspirations des consommateurs et la montée du e-commerce : pour le conseil, « cette crise doit être l’opportunité pour repenser les relations entre commerçants et bailleurs ». A son avis, le triptyque gagnant sera celui de la proximité, de la digitalisation et du respect de l’environnement. Concernant les valeurs, si les aides du gouvernement ont permis de freiner la vacance, les faillites et les corollaires ne seront pleinement visibles qu’en 2021, avec un ajustement inévitable à la clé, notamment pour les secteurs ayant connu les plus fortes hausses, à l’instar des artères « prime » frappées par l’effondrement du tourisme international. Approcher le commerce dans sa globalité pour une stratégie d’acquisition d’actifs devient de plus en plus impossible, devront être scrutés format, réseau existant, emplacement, dynamiques territoriales, secteur d’activité, puissance de la marque, maillage, stratégie commerciale… Dans ce contexte, les baux devront aussi faire preuve de flexibilité, puisque la prise en compte du seul chiffre d’affaires du point de vente sera dépassée, compte tenu de la digitalisation et de la démultiplication des fonctions du magasin.

Résidentiel : ralenti, mais résilient

Le résidentiel français est toujours ralenti par la faiblesse de l’offre, mais dans un marché de l’investissement où de nombreuses classes d’actifs ont été fragilisées, le résidentiel est parmi les premières cibles des candidats à l’acquisition, surtout que les notions de bien-être au domicile ont connu un « boom » avec les confinements. La part des institutionnels dans le parc de logement est passée de 20 à 2 % en 20 ans, et trouver de l’offre dans un marché extrêmement fragmenté, a fortiori ralenti par les contraintes administratives, sera un défi pour les investisseurs. Devant les changements socio-économiques, CBRE constate qu' »hier, il y avait « un » produit logement, en copropriété ; demain, il sera pluriel, géré par un opérateur, détenu par un investisseur, permettant ainsi un meilleur entretien des actifs, à l’image des résidences nouvelle génération seniors, étudiantes, coliving qui offrent à leurs résidents à la fois qualité, flexibilité et services. Et la crise de la Covid-19 n’est pas venue remettre en question le développement de ce type de résidences services. Si les résidences étudiantes ont pu voir leur taux d’occupation baisser, avec une année universitaire en pointillés, elles pourraient s’avérer être d’autant plus favorisées à l’avenir pour répondre à ce nécessaire besoin de flexibilité ».

Les taux de rendement resteront bas en raison du déséquilibre entre offre et demande, mais les marchés résidentiels du reste de l’Europe se montrent plus matures que celui de l’Hexagone, avec des parts de marché à l’investissement oscillant entre 20 et 40 % selon les pays et les années.

CBRE confiant pour 2021