Né en Californie au début des années 2000, ce concept d’habitat, qui a le vent en poupe aujourd’hui, peine à trouver une définition précise, chaque opérateur ayant sa propre conception du terme. Pour ne pas s’y perdre, quatre principes généraux composent le coliving : flexibilité de durée d’engagement, services, espaces privatifs et espaces partagés.

Quelques données…

En 2019, selon une étude de BNP Paribas Real Estate, le marché du coliving représentait plus de 5 000 places en France, dont la moitié en Ile-de-France. Un chiffre qui devrait évoluer largement à la hausse ces prochaines années, selon Xerfi : « l’offre de coliving va croître de manière exponentielle d’ici 2023, pour atteindre 14 500 lits ». Ces résidences se composent, en règle générale, d’une dizaine d’habitations (dont la superficie est, en moyenne, de 17 m2), agencées autour d’espaces communs. De part leur superficie réduites, ces logements attirent en majorité des jeunes actifs (entre 25 et 35 ans), en période transitoire, en quête d’un logement facile d’accès et de courte durée (de trois mois à un an, en règle général). A l’heure ou la distanciation sociale est de mise, l’envie de recréer des liens et le besoin d’espace de cette population sont, plus que jamais, présents. Une « chance » pour le coliving, d’autant plus que l’accès au logement locatif dit « traditionnel » est de plus en plus complexe pour les jeunes actifs, comme en témoigne Guillaume Robert-Legrand, président-fondateur de Coliving Factory : « il existe très peu de produits type T1,T2 disponibles, l’urbanisme poussant à produire de plus en plus de logements familiaux ». Ainsi, une enquête commandée par Whoomies, plateforme de réservation de colocation, coliving et résidence étudiante, révèle que chaque année, » la demande en coliving augmente de 20 %, en moyenne ». Sur la première période post-confinement, d’avril à septembre 2020, le groupe a observé une augmentation des demandes mensuelles d’environ 30 %, prouvant l’intérêt croissant des millenials pour le logement partagé. 44 % d’entre eux (et 52 % en Ile-de-France) seraient désormais prêts à adopter ce mode de logement, si les conditions d’accès étaient plus flexibles qu’un logement traditionnel.

Mais, toute la complexité, ou la force, selon les points de vue, de ce nouveau venu qui pourrait révolutionner le monde de l’immobilier se trouve dans la pluralité de son offre. Quel modèle choisir ? Alors que son entrée sur le marché est récente, le coliving est en perpétuelle évolution. Les formes changent : appartements plus ou moins grands, studios, chambres privatives ou partagées… De la maison découpée en chambres et espaces communs, aux larges programmes immobiliers, il y en a pour tous les goûts.

Diversité de l’offre

Un des concepts innovants qui semble se répandre comme une trainée de poudre ces dernières année n’est autre que la résidence de coliving à « thèmes ». Ces habitations incluent un processus de sélection à l’entrée, afin de rassembler dans un même espace des habitants partageants des goûts ou loisirs communs. C’est le pari que s’est lancé le groupe la Casa, en rassemblant au sein de « casa » à thèmes, des geek, des fans de musculation ou encore des mordus de cuisine. Les équipements de ces résidences et les services sont donc choisis en fonction de ces thématiques, tout comme les futurs locataires, qui sont désignés par les habitants eux-mêmes.

Mais, ce concept est loin d’être le seul à se développer : le marché étant encore au stade embryonnaire, de nombreux acteurs du secteur profitent de l’occasion pour expérimenter différents modèles. Ainsi, certains d’entre eux réfléchissent déjà à des coliving version HLM, à l’image de Colonies. François Roth, co-fondateur du groupe, affirme : « nous aimerions travailler l’aspect social. Les jeunes vont peu vers les offres HLM, ils ne songent souvent pas à en faire la demande. Alors, nous réfléchissons à des offres de coliving social, pour leur faciliter l’accès au logement ». Après avoir livré de nombreuses résidences de coliving plus « traditionnelles », le groupe travaille sur une offre adaptée au logement intermédiaire et social, avec des loyers encadrés. Colonies projette également de développer une offre dédiée aux mères célibataires ou encore aux familles, afin de leur offrir des résidences disposant de tous les équipements nécessaires pour accueillir parents et enfants.

Cette multiplication des services, frôlant parfois la frontière de l’hôtellerie, est largement plébiscitée. Toujours d’après l’étude de Whoomies, les millenials choisissent, pour près de 25 % d’entre eux, un espace de coliving pour les services tout inclus (internet, espaces de coworking). Cependant, certains acteurs nagent à contre-courant, convaincu qu’une offre plus minimaliste est l’avenir du secteur. C’est notamment le cas de Coliving Factory, qui mise sur un modèle simple, centré autour du logement. Le groupe ne propose « pas d’offre de restauration, ni d’espaces de coworking » affirme Guillaume Robert-Legrand, président fondateur de la société. « Par conséquent, par temps de tempête nous sommes moins affectés » ajoute-t-il. Ce modèle a particulièrement fait ses preuves lors de la pandémie où les résidences du groupe n’ont nécessité aucune fermeture.

Perspectives de développement

Difficile de visualiser l’avenir du coliving dans sa globalité, tant le secteur est en pleine structuration. D’une part, les ensembles de taille moyenne, bien que moins visibles, semblent offrir un modèle plus résilient. De l’autre, les vastes projets immobiliers, à l’image de The Babel Community, affichent des taux de remplissage conséquents et maintiendront probablement une belle rentabilité. Sur ce terrain mouvant, on peut imaginer que le coliving va évoluer vers des positionnements très divers, en proposant des expériences variées, selon les publics auxquels il s’adresse. Cette pensée n’effraie pas François Roth, co-fondateur de Colonies : « ce n’est pas un marché « the winner takes it all » » ; il y a plus de demandes que d’offres, il n’y a donc pas de crise de l’offre à prévoir dans les dix ou vingt prochaines années ». La plupart des acteurs du marché s’accordent, ainsi, à dire que la tension est telle, que tout ceux qui créent une offre parviennent à la remplir. Toujours selon François Roth, il reste encore à démocratiser le coliving pour « qu’il ne soit pas un gadget ». Le but à présent : faire connaître auprès de tous, ce nouveau format d’habitation encore trop méconnu du grand public. D’après Benoît Jobert, co-fondateur de The Babel Community, « aujourd’hui, les gens nous trouvent en tapant dans leur barre de recherches « logement meublé, mais pas « coliving » spécifiquement ». La confiance semble, néanmoins, être de mise, d’après Guillaume Robert-Legrand, président fondateur de Coliving Factory : « l’appropriation du grand public sera rapide car le produit est très simple. Il y aura un vrai tournant en 2022″…

Coliving : un secteur qui innove et fait recette