Doit-on s’attendre à un « retour à la normale » en 2021 ?

Nous estimons que le retour à une activité « normale » peut être envisagé d’ici six mois, à fin 2021. A Paris, notamment, nous nous attendons à une reprise rapide du marché, portée en partie par les Jeux Olympiques, ainsi que par les autres compétitions sportives programmées dans la Capitale.

La confiance des investisseurs a-t-elle faibli ces derniers mois ?

Il y a un paradoxe. D’un côté, le marché souffre grandement, de l’autre, les investisseurs sont toujours aussi présents dans le secteur hôtelier. Ils se positionnent dès qu’il y a une opportunité. Nous avons plus de demandes que d’offres. S’il y a très peu de transactions, ce n’est pas dû aux investisseurs, mais plutôt aux vendeurs. Beaucoup ont une réelle réticence à céder leurs actifs. La plupart ne veulent pas subir une décote imposée par les acheteurs, au motif que les hôtels sont toujours fermés.

Quels sont les biens qui souffrent le plus de la crise ?

Personne n’a été épargné, que ce soient les grandes villes, la montagne, le littoral… Le bilan est très lourd. Depuis le premier confinement, soit depuis mars 2020, de nombreux hôtels ont gardé leurs portes closes. Il s’agit majoritairement d’hôtels à la clientèle internationale. Ces derniers souffrent depuis le début de la pandémie, ayant des difficultés à gagner une autre clientèle. Les hôtels de province maintiennent, eux, un niveau convenable la semaine, portés par le tourisme d’affaires, mais sont loin du niveau post-crise et sont, par ailleurs, de plus, désertés le week-end.

Quelles sont les localisations géographiques privilégiées ?

Lorsqu’un bien est à vendre à Paris ou en Ile-de-France, Covid ou non, les investisseurs se précipitent. Ce qui est étonnant, c’est que Paris soit à la fois le marché qui suscite le plus d’intérêt et celui qui souffre le plus de la crise, puisque le nombre d’hôtels qui ont fermé leurs portes dans la Capitale est conséquent. Mais les investisseurs restent confiants, cela se voit puisque même ces hôtels, actuellement fermés, continuer de susciter l’intérêt.

Les grandes villes françaises séduisent également toujours, Lille, Marseille, Lyon, Bordeaux, Toulouse, Nantes… Nous avons vendu plusieurs biens l’année dernière dans ces métropoles, aussi bien à des investisseurs français, qu’internationaux.

Comment l’hôtellerie peut-elle se réinventer pour s’adapter à nos nouveaux modes de vie ?

L’hôtellerie va devoir s’adapter à la nouvelle manière de voyager de ses clients. Ces derniers chercheront plus de chaleur humaine, plus d’espaces, d’échanges. Même si ce sont les lieux les plus problématiques en cette période de crise sanitaire, nous prévoyons une forte reprise pour les auberges de jeunesse. Nous pensons que la durée moyenne des séjours hôteliers risque de s’allonger. Les hôtels devront donc se réinventer pour favoriser les séjours « longue durée » en ajoutant, par exemple, une kitchenette, un espace salon…

Les grands challenges à venir ?

Le challenge le plus évident est de récupérer les parts de marché, ainsi que la clientèle perdue. De se remettre en scelle. Ce qui s’annonce difficile. Lorsqu’on ouvre un hôtel, nous prévoyons une première année compliquée, mais, à l’échelle d’un hôtel, la situation est maîtrisable. En l’occurence, c’est l’ensemble de l’hôtellerie qui va devoir monter en puissance. Une tâche fastidieuse.

Un challenge plus sous jacent est l’hébergement partagé, du type Airbnb. Ce dernier grignote des mètres carrés sur l’immobilier résidentiel, rend les centres-villes inaccessibles et peut créer une concurrence déloyale face à l’hôtellerie. Ces plateformes ne sont soumises à aucune réglementation et prennent beaucoup de place. Pour lutter contre cela, il faudra créer un espace réglementé.

Quelles sont les dernières actualités de Christie & Co?

Nous nous félicitions de l’une de nos dernières transactions de l’année 2020. Il s’agit de l’hôtel Holiday Inn à Paris, Porte de Clichy. Cet hôtel d’affaires milieu de gamme de 262 chambres, l’un des plus grands de l’agglomération parisienne, a été vendu au groupe Extendam, en novembre dernier.

Nous avons également vendu un portfolio de 25 hôtels, représentant 1 583 chambres, sous cinq enseignes du groupe Accor, Hôtel F1, ibis Budget, ibis, ibis Styles et Mercure, en février 2020. Ces ventes démontrent la capacité des investisseurs à naviguer dans un marché secoué par une crise sans précédent.

Philippe Bijaoui (Christie & Co) : "pour l'hôtellerie, un retour à une activité normale peut être envisagé d’ici six mois"...