Vous avez créé Oscar Développement (devenu simplement Oscar à l’occasion des vingt ans de l’entreprise) en 2002. Qu’est-ce qui vous a décidé à vous lancer dans cette aventure ?

Après avoir travaillé pendant dix ans dans la publicité, j’ai racheté une entreprise à l’âge de 30 ans, puis une deuxième et une troisième, que j’ai ensuite revendues toutes les trois. Grâce aux fonds ainsi glanés, j’ai acquis un immeuble pour en faire du locatif, suivi d’un second… La machine était lancée ! En interne, Oscar n’emploie que des ingénieurs et des architectes ; nous sous-traitons les activités commerciales. J’ai souhaité bâtir une entreprise technique spécialisée dans la seconde vie des bâtiments. Seulement, il y a cinq ans, j’ai voulu enclencher une importante phase de développement d’Oscar, pour éviter que des concurrents ne nous grillent la politesse sur le créneau de la restructuration. Nous avons aujourd’hui 25 opérations en cours de développement réparties dans la France entière, représentant 1 000 logements en cours de production/réhabilitation (plus de 400 logements produits par an). Nous sommes passés d’une démarche opportuniste à une autre, structurée, maillée sur tout le territoire national ; cela passe par l’ouverture de nouvelles agences, en plus des cinq que nous possédons déjà : Aix-en-Provence (13) et Bordeaux (33) avant la fin de l’année, puis Nantes (44) et Strasbourg (67) très prochainement.

Le 29, une résidence étudiante de 48 studios à Lyon Bellecour (69)

Cette volonté d’expansion et de maillage du territoire français découle-t-elle d’une détermination à rester l’acteur de référence de la restructuration d’immeubles en France, pour ne pas vous faire damer le pion par de gros promoteurs désireux de se diversifier ?

Nous voulons continuer à développer notre savoir-faire. La réhabilitation est un vrai métier, complètement différent du neuf, qui ne s’improvise pas d’un coup de baguette magique. Les réflexes diffèrent, les constructions d’immeubles ne sont pas appréhendées de la même manière. Je vous donne l’exemple de ce que nous avons fait à Lille, où nous avons repris un hôpital psychiatrique, ou à Lyon, avec les anciens hammams de la ville : vous ne pouvez pas y toucher car vous vous trouvez en secteur patrimoine ; du coup, c’est un véritable casse-tête de restructurer ces lieux tout en laissant intacts les emplacements de fenêtres, les espaces les séparant, la structuration des pièces… Il a donc fallu s’adapter à tous types de situations, tous types de configurations. Ce qui me révolte et me conforte dans ma vocation de faire de la restructuration, c’est cette tendance à raser les immeubles pour rebâtir derrière, sans respect du climat et de la nature. C’est une aberration ! De notre côté, nous pourrions en faire un peu plus avec davantage de volonté politique. Les autorisations sont compliquées à obtenir de la part des pouvoirs publics. Il y a d’un côté le discours politique officiel qui affiche sa volonté de construire plus de logements pour pallier la pénurie d’offres et, de l’autre, la réalité concrète du terrain, où l’on observe un manque de « courage » et, surtout, de volontarisme de la part des collectivités publiques.

Le chalet Yéti, à Megève (74)

Les thématiques environnementales sont au cœur des choix des acteurs de l’immobilier, tout comme des politiques publiques visant à encadrer drastiquement l’artificialisation de nouveaux sols. Cette problématique a-t-elle conditionné votre volonté de vous lancer dans la restructuration d’immeubles, il y a 20 ans de cela ?

Oui, bien sûr. Encore une fois, il est aberrant de démolir pour reconstruire au même endroit, c’est une solution de facilité qui n’apporte aucune valeur ajoutée si ce n’est de dégrader l’environnement. En revanche, il y a une multitude de friches à disposition, qui ne demandent qu’à être réemployées pour de nouveaux projets. En plus du gain écologique que cela induit (non-artificialisation de nouveaux sols…), c’est aussi un atout particulièrement valorisant pour les quartiers environnants. Cela peut contribuer à redynamiser les cœurs de ville, sujet cher au gouvernement, en faisant revivre des lieux tombés en désuétude et devenus inutiles dans leur usage en même temps que laids d’un point de vue esthétique.

Quels types d’actifs privilégiez-vous, notamment en terme de taille ?

Déjà, il faut savoir que le spectre de nos projets est large, puisque le plus petit d’entre eux comptabilise trois logements, tandis que le plus grand en fait 300. En terme de surface, cela va de 200 à 19 000 m2. Nous ne sommes pas dans une volonté de faire du nombre, nous privilégions la qualité des projets à leur multiplication. La production chiffre d’affaires sur les 1 000 logements est d’environ 165 millions d’euros.

La villa Pontou, 50 appartements meublés à Ecully (69)

Dans un autre registre, vous avez financé le robot Oscar, utilisé en pédiatrie au Médipôle de Lyon-Villeurbanne pour rassurer les enfants hospitalisés. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Le projet plonge ses racines dans l’expérience personnelle qu’avons vécue mon épouse et moi-même ; cela nous a conduits à être au plus près de la détresse et de la souffrance que vivent les enfants hospitalisés. Un ami d’enfance m’a un jour mis en relation avec un anesthésiste qui m’a fait entrer dans son service. Là, des soignants m’ont soumis l’idée d’un robot. J’ai été séduit et leur ai donné carte blanche, les assurant de mon soutien financier. Ce robot humanoïde était déjà présent dans les entreprises et dans certains services hospitaliers, mais pas auprès des enfants. C’est pourtant très utile car cela leur permet d’évacuer du stress en amont d’une opération. Ce robot communique avec les enfants, leur demande s’ils veulent chanter ou danser, leur remet un diplôme après l’opération, fait des selfies… Le but est désormais d’intégrer de l’intelligence artificielle à Oscar car nous souhaitons, par la suite, le mettre à disposition des centres de cancérologie pour enfants et d’autres services plus « longue durée », pas uniquement en ambulatoire. Pour ça, il faudra que le robot s’adapte pour ne pas poser systématiquement les mêmes questions en boucle, qu’il puisse renouveler sans cesse sa « conversation ». Mon épouse et moi-même allons financer deux à trois robot chaque année, pour un prix unitaire d’environ 35 000 euros…

Christophe Cocquerel (Oscar) : « j’ai souhaité bâtir une entreprise spécialisée dans la seconde vie des bâtiments ! »...