Pourquoi le sujet de l’encadrement des loyers revient-il dans l’actualité ?

Le sujet est plus que jamais d’actualité puisque nous arrivons, le 28 novembre prochain, au terme de la période pendant laquelle les communes et les EPCI peuvent se porter candidates à l’expérimentation. Après cette date, ceux qui ne l’auront pas fait ne seront plus éligibles à l’instauration d’un encadrement des loyers sur leur territoire.

D’où les annonces toutes récentes de diverses municipalités sur la mise en place d’un encadrement ?

Il y a vraisemblablement un double phénomène : d’une part, cette date couperet et de l’autre, la conséquence des municipales, avec des élus, notamment les nouveaux élus, qui ne s’étaient pas positionnés auparavant.

Quels sont ceux qui peuvent se porter candidats ? Et que se passe-t-il ensuite ?

Comme le précise la loi Elan, le texte vise à la fois les communes et les EPCI compétents en matière de logement, la commune de Paris, l’établissement public territorial du Grand Paris, du Grand Lyon et la métropole d’Aix. Il faut ensuite qu’un décret gouvernemental autorise la mise en place de l’expérimentation, après examen du respect d’un certain nombre de conditions fixées par le texte de loi. Ensuite viendra l’arrêté pris par le représentant de l’État dans le département concerné, avec les loyers minimum, maximum, par quartiers, typologie de logements…

Quelles sont ces conditions et sont-elles difficiles à remplir ?

Elles sont au nombre de quatre et ne sont, en réalité, pas très difficiles à remplir en raison des adjectifs utilisés qui conduisent à une appréciation assez subjective de ces conditions. Ainsi, « un écart important entre le niveau de loyer constaté et le loyer médian », « un niveau de loyer médian élevé », « un taux de logements commencés rapporté au taux de logements existants faible » et, enfin, « des perspectives limitées de production annuel de logements inscrites dans les PLU ». Comme on le voit, les adjectifs utilisés laissent une marge d’appréciation très large des critères et le contrôle du Conseil d’État, si ce dernier devait être saisi, sera délicat.

Il n’y a plus d’obligation d’un observatoire agréé ?

Non, l’existence d’un observatoire est, cependant, de fait nécessaire pour établir les loyers de référence, mais il n’y a pas d’obligation d’un observatoire agréé.

Sait-on combien de communes ou d’EPCI se sont déjà portés candidats ?

A mi-octobre, les candidatures en cours sont celles de Lyon, Bordeaux et Montpellier. Ont annoncé vouloir se porter candidates : Angers, Caen, Grenoble-Villeurbanne, Marseille, Nice, Saint-Nazaire et Toulouse. Ces communes sont en attente d’un vote municipal pour entériner cette candidature.

Comment peuvent réagir les investisseurs institutionnels à la mise en place de cet encadrement ?

L’existence d’une date butoir est de nature à rassurer les investisseurs car elle met fin à une période d’incertitude. Ceux-ci seront bientôt fixés sur les communes qui ont mis en place un encadrement des loyers et auront, ainsi, une vision à cinq ans de ce qui se passe dans ces territoires. Il leur appartient, ensuite, de se positionner ou pas sur des actifs dans les villes concernées par cette expérimentation.

Paris fut la première à mettre en place l’encadrement : les institutionnels ont-ils freiné leur investissement ?

Si l’on se réfère aux loyers observés à Paris dans des immeubles « classiques », soit sans services particuliers, les institutionnels se sont adaptés et le loyer d’observation est assez conforme à leur pratique. Avec trois tempéraments, cependant : pour les petites surfaces où la contrainte semble plus grande et pour le complément de loyer. Sur ce dernier point, le texte est peu précis et en conséquence inconfortable, mais l’enjeu financier, logement par logement est faible ; il existe, en conséquence, peu de contentieux à ce sujet. Il existe, enfin, un dernier tempérament qui concerne les produits pour lesquels la contrainte est forte : ceux qui sortent de l’immobilier résidentiel « traditionnel », en présentant des services ou des espaces communs. Concernant ce type de projets, le texte est inadapté et, s’il y a peu d’exemples à Paris, il existe, en province et notamment dans certaines villes candidates, des développements qui pourraient être concernés.

Les éventuels investisseurs étrangers sont-ils freinés par ce dispositif ?

Ils nous interrogent, ce qui montre qu’ils sont intéressés et que l’encadrement n’est pas rédhibitoire. Mais il leur est parfois difficile de comprendre le fonctionnement de ce système, surtout à Paris, où coexistent encadrement et plafonnement des loyers. La contrainte en elle-même peut être acceptée et intégrée dès lors qu’elle est claire, précise et prévisible ; ce n’est alors « plus » qu’une question d’incidence financière. Mais le champ laissé à l’interprétation, le risque de se tromper tout en étant de bonne foi, n’est pas de nature à faciliter les choses.

Le point sur l’encadrement des loyers avec maître Sidonie Fraîche-Dupeyrat (LPA-CGR)