Quel bilan pour l’investissement industriel et logistique cette année ?

Depuis dix ans, entre 2009 et 2019, les prix de l’immobilier industriel et logistique augmentent, les taux de rendement baissent et le volume d’investissement est en hausse. Fin 2019, avec un volume représentant le double de sa moyenne historique (6 milliards d’euros, contre 3) et un taux de rendement divisé par deux (de 8 à 4 %), on pouvait légitimement penser que le marché était en passe d’atteindre une fin de cycle. C’était sans compter sur l’effet Covid qui, à défaut d’interrompre le cycle, a eu un effet accélérateur »…

Pour quelle(s) raison(s) ?

Quatre raisons principales. D’abord, la logistique au sens large, soit le transport plus l’immobilier, est apparue encore plus essentielle à la société dans son ensemble au cours des périodes de confinement, ce que l’on qualifie de « résilience de la logistique face à la crise sanitaire ».

Ensuite, directement lié à cette crise vient le développement du e-commerce avec ses conséquences sur la consommation de mètres carrés.

Par ailleurs, l’émission de la dette publique à des taux très bas à long terme favorise l’investissement en immobilier qui retrouve son rôle de valeur refuge.

Enfin, s’ajoute un effet de report des capitaux sur le marché de l’immobilier logistique plutôt que sur le bureau et le commerce.

Au final, aux côtés des raisons de fond qui préexistaient avant la crise sanitaire et qui avaient suscitées un engouement pour l’immobilier logistique depuis une dizaine d’années, ces quatre raisons supplémentaires viennent s’agréger avec pour résultat un effet accélérateur sur le marché…

Comment cette situation se traduit-elle ?

Auparavant, nous enregistrions dix demandes pour une offre sur le marché. Aujourd’hui, les demandes sont deux fois plus nombreuses… La situation se traduit également par le retour des capitaux allemands dans l’Hexagone. Ou encore, côté rendements, par un plancher de 4 % aujourd’hui bien « enfoncé », ainsi qu’un volume d’échanges à nouveau historique cette année, qui devrait dépasser les 4 milliards d’euros sur les actifs industriels et logistiques.

Quelles tendances pour 2021 ?

2021 devrait être encore une bonne année pour l’investissement logistique, animée par la soif des investisseurs, mais surtout par les opérations de « sale and lease back », dont le volume avait déjà doublé en 2019 et qui devraient représenter près de 25 % du marché l’an prochain. Signe des temps, les utilisateurs ont besoin d’argent !

Au final, le volume investi devrait être, une fois de plus l’an prochain, au-dessus de la moyenne historique compte tenu des opérations en cours que nous enregistrons actuellement.

Le portefeuille « Proximity », composé de 19 bâtiments à usage de logistique urbaine, représentant 125 000 m2 au total pour la partie française, acquis par Blackstone auprès de Melcombe pour 180 millions d’euros, sur la base d’un taux de rendement de 4,5 %…

Des exemples d’opérations en cours chez CBRE ?

Nous préparons, par exemple, la vente, par un utilisateur, d’un portefeuille d’environ 250 millions d’euros dans le cadre d’une opération de « sale and lease back » portant sur une douzaine de plateformes réparties dans l’ensemble de l’Hexagone.

Nous allons également présenter au marché un autre portefeuille d’une soixantaine de millions issu, lui aussi, d’une opération d’externalisation.

Nous nous sommes également vu confier la recherche d’un investisseur pour un magnifique foncier à redévelopper, représentant un peu moins d’une trentaine d’hectares en Ile-de-France…

… ou encore le Chambord Logistics Park, composé de trois entrepôts (123 000 m2), acquis par Real IS auprès d’AXA pour 132 millions d’euros, sur la base de 3,90 % : deux exemples de transactions bouclées par CBRE.

Au total, quel volume à mettre sur le marché par votre équipe ?

Nous démarrerons 2021 avec un volume d’environ un milliard d’euros d’opérations déjà engagées ou à mettre sur le marché.

Quels résultats cette année ?

Dans un marché qui devrait dépasser les 4 milliards d’euros d’investissements dans l’immobilier industriel et logistique, notre part de marché devrait être supérieur à 60 %.

Quel(s) conseil(s) à un nouvel entrant ?

La réponse est intimement liée à la nature du nouvel entrant. Quelle stratégie souhaite-t-il appliquer ? S’agit-il de court, de moyen ou de long terme ? Quelles sont ses attentes en matière de rendement ? Quel appétit au risque ? Quel besoin de financement ? Une fois que l’on a défini à qui l’on s’adresse, on peut passer au problème du « quoi »…

Une réponse standard consisterait à déclarer que la prime de risque sur l’entrepôt logistique est essentiellement liée, désormais, à la liquidité locative. Donc, si tant est que l’on achète des bâtiments de bonne facture (construits, si possible, après 2002), proches des grands axes de communication et qui disposent d’un bassin d’emplois suffisant, il convient d’envisager la constitution d’un portefeuille d’au moins un demi-milliard d’euros afin d’obtenir un bon couple risque/rendement… toute la difficulté restant de battre la concurrence et de trouver suffisamment de produits…

François Le Levier (CBRE) : « la crise sanitaire a un effet accélérateur dans la logistique »…