Côté commerces, on a lu avec intérêt les différentes tribunes publiées, la dernière, ce 16 avril, dans « Les Echos » par un « collectif de 200 dirigeants d’enseignes et de 15 fédérations du commerce ». La demande ? Obtenir « l’annulation des loyers durant la période de fermeture et leur indexation sur la réalité de notre activité après la reprise ». Et donc, de manière globale et indifférenciée, pour de très grandes (et certaines très prospères) enseignes comme pour les petites TPE, forcément plus fragiles. Ce moratoire global, qui n’est demandé ou obtenu à notre connaissance dans aucun pays de l’Union Européenne, doublé d’une nouvelle forme de calcul des loyers (et donc d’une nouvelle législation ?) aurait des conséquences très calculables non seulement pour les foncières, mais aussi les institutionnels, au premier rang desquels les compagnies d’assurance.

Plus grave encore, on voit mal qu’on puisse accorder ce non paiement aux commerçants et… le refuser aux entreprises utilisant des bureaux, qui disposent d’ailleurs d’un « bail commercial ». Ce même raisonnement pourrait aussi valoir pour les loyers d’habitation, dont beaucoup d’occupants sont au chômage. Et pourquoi pas au remboursement des prêts pour une voiture non utilisée, pour l’essentiel, et pourquoi pas des primes d’assurance afférentes ?

Autant donc il paraît indispensable d’accorder aux petites structures isolées, comme aux petits restaurateurs et hôteliers, déjà durement touchés par les grèves, des facilités, voire des abandons de créance, autant le moratoire global paraît une folie dont on ne saurait comment se débarrasser.

Le parallèle avec le confinement s’impose : il paraît (relativement !) simple de décréter le confinement général… mais la question de la sortie est infiniment plus délicate ; chacun le constate aujourd’hui.

La France s’est engagée en 1914 dans un moratoire des loyers (d’une logique absolue, comment le réclamer alors que les hommes sont au front et que les femmes, à l’arrière, ne bénéficiaient pratiquement d’aucune aide ?)… mais la sortie du dit moratoire fut un casse tête qui perdura jusqu’après le seconde guerre mondiale !

N’inventons donc pas un système absurde protégeant de grands réseaux prospères comme de petits commerçants asphyxiés, les multinationales comme les TPE. N’ajoutons pas aux incertitudes du déconfinement, de graves questions sur l’après, et ne tuons pas la filière industrielle de l’immobilier. Combien de temps faudrait-il pour la reconstruire et avec quelles conséquences sur l’emploi, l’attractivité de la France et de sa Capitale ?

Le moratoire global des loyers : la vraie fausse bonne idée