« L’Ile-de-France a été une région collectivement bâtisseuse ! » s’exclame Nicolas Bauquet, directeur général de l’Institut Paris Région. L’étude publiée par les équipes de l’Institut fait état d’un accroissement de la production de logements depuis vingt ans sur le territoire francilien. En 2017, l’objectif de construction de 70 000 logements par an est atteint (jusqu’en 2019). Un dynamisme qui fait même pâlir Londoniens et New-Yorkais, dont les résultats en la matière sont bien en-deçà de ceux de l’Ile-de-France. Entre 2001 et 2010, 420 000 logements ont été mis en chantier ; la décennie suivante (2011-2020), ils étaient 660 000 !

Une progression particulièrement marquée en petite couronne (+79 % entre les deux périodes précédemment citées, soit 300 000 logements mis en chantier entre 2011 et 2020), avec des niveaux de production parfois doublés, d’importants projets d’aménagement et la transformation d’anciens territoires industriels. En grande couronne, la progression entre les deux périodes n’a été « que » de 41 %. « La grande couronne a beaucoup évolué, avec des besoins d’habitation qui se sont structurés en sortant du modèle traditionnel de la maison individuelle pour s’orienter vers des formes d’habitations collectives (cohabitations de jeunes), monoparentales ou encore accueillant des personnes âgées désireuses d’investir un logement moins cher qu’en petite couronne afin de réaliser des économies » éclaire Martin Omhovère, directeur du département Habitat et Société à l’Institut Paris Région.

La réalisation de maisons a baissé de 9 % par rapport aux années 2000 entre 2011 et 2020, à l’inverse des appartements (+78 %) et des logements en résidence (+142 % !). Du même coup, la surface foncière mobilisée a baissé, avec une optimisation/sobriété foncière, passant de 1 075 hectares/an entre 2001 et 2005 à 765 hectares/an entre 2016 et 2020. La baisse des extensions sur les espaces naturels agricoles et forestiers a également été réelle, de 260 hectares/an entre 2001 à 2005 à 150 hectares/an de 2016 à 2020. Les extensions naturelles n’excèdent pas le quart, sur aucune période, de la mobilisation foncière totale associée à la production de logements en Ile-de-France (renouvellement/densification, changement d’usage du sol vers du logement, production en dents creuses).

Les logements ont perdu en superficie moyenne au cours de ces vingt dernières années. une baisse des surfaces qui s’explique par la recul de la construction de maisons et la montée en puissance des appartements, mais pas uniquement. Ainsi, à structure de logements constante, la superficie moyenne des logements neufs a tout de même perdu 9 m2.

Le logement social moins à la fête

Au cours des vingt dernières années, près de 367 000 logements sociaux supplémentaires ont été mis en service. « Près de 50 % des logements sociaux bâtis entre 2011 et 2020 l’ont été en grande couronne » complète Martin Omhovère. Petite précision : 80 % des ménages franciliens sont éligibles au logement social. Si le parc social augmente (640 000 logements sociaux en 2019, +22 % depuis 2013), sa production n’a été que de 20 700 logements par an au cours de la période 2011-2020 en Ile-de-France, loin des 32 000 logements sociaux attendus chaque année au titre de la loi SRU.

Le parc inoccupé tend également à croître (+16 500 par an), un parc composé de résidences secondaires, pied-à-terre occasionnels, locations saisonnières à l’année, logements transitoirement vacants. Ces logements inoccupés progressent plus rapidement que le reste du parc, en grande et en petite couronne, contribuant à faire diminuer, depuis la fin des années 2000, la part des logements servant à loger durablement les Franciliens.

L’un des vrais soucis réside en des prix élevés du foncier, conséquence de sa raréfaction. La chute de la demande entraîne également une autre conséquence : bien que des permis de construire soit délivrés par des communes ou des intercommunalités, l’acte de construire est parfois mis en stand-by faute de locataires déjà trouvés et de futurs recettes assurées. Les projets de construction se retrouvent d’autant plus retardés… Sans compter qu’en dehors de l’aménagement de zones d’activités, les projets de constructions urbaines se heurtent parfois à la réticence, voire à la non-acceptabilité des riverains avec, à la clé, des recours contentieux. Autant de difficultés freinant la construction de logements sociaux, ce parc à destination des moins favorisés n’ayant pas « pleinement bénéficié de l’embellie de la construction observée au cours des années 2015-2019″…

L'Ile-de-France, une région bâtisseuse