Face aux sénateurs de la Commission des affaires économiques, Véronique Bédague s’est longuement exprimée sur la situation du logement en France. « Chez Nexity, nous produisons 20 000 logements par an » a-t-elle démarré. « La rénovation/transformation de l’existant occupe une place de plus en plus importante au sein de notre activité, en témoignent les réhabilitations d’une ancienne caserne de pompiers en logements au Havre, ainsi que celle d’une autre caserne, cette fois-ci d’infanterie, à Montpellier ». Elle a également plaidé pour la réhabilitation de parkings en silo en logements.

« La vraie question que nous devons nous poser, c’est : est-ce que je logerais mes propres enfants au sein de tel ou tel logement ? » a-t-elle interrogé. Manière de dire que le confort d’usage est également un critère prépondérant dans la promotion de logements, qu’ils soient neufs ou consécutifs à une rénovation. D’ailleurs, Véronique Bédague a insisté sur le fait qu’en 2026, 10 % de la production totale de Nexity serait issus de l’existant. « Nous développons des projets inclusifs, un tiers d’entre eux étant du logement social ».

Un vrai déficit de logements en France

La présidente-directrice générale de Nexity a, ensuite, mis les pieds dans le plat au sujet d’un nombre de logements neufs insuffisant dans notre pays : « il existe une véritable insuffisance de l’offre, qui est aussi la conséquence d’une réticence de nos concitoyens, particuliers comme élus, à densifier la ville ». Elle a déploré la baisse des octrois de permis de construire, de même que la cécité, voire le cynisme, d’un certain nombre de responsables politiques, hauts fonctionnaires ou « experts » qui continuent à affirmer qu’il n’y a pas de problème de logements en France. « A ceux qui affirment cela, je réponds qu’au sein de nos agences, il y a aujourd’hui deux fois moins d’offres à la location qu’il n’y en avait période pré-Covid, contre une fois et demi plus de demandes ».

Véronique Bédague reconnaît également que la chute de la demande, résultante de la remontée des taux d’intérêt et du durcissement des conditions d’attribution de crédits immobiliers (découlant des instructions du Haut Conseil pour la Stabilité Financière), a entretenu cette spirale de crise du marché. « D’après nos calculs, nos clients ont perdu de 7 à 8 mètres carrés de pouvoir d’achat depuis le début de l’année 2022 » informe-t-elle. « L’Etat doit être plus interventionniste et planificateur, nous ne pouvons plus réagir au coup par coup sur un sujet aussi central dans la vie des Français. Je ne crois pas aux vertus infinies de la main invisible du marché sur ce sujet, je plaide pour un Etat-stratège disposant d’une vision claire et ambitieuse ».

Une primo-accession de plus en plus tardive

Véronique Bédague s’est ensuite exprimée sur la problématique de la primo-accession, dont l’âge ne cesse de reculer en France. « Nous avons noté que, parmi nos clients, l’âge de la primo-accession recule d’un an environ chaque année. Il se situe aujourd’hui à 37 ans en moyenne ! ». Stupeur dans la salle, où des soupirs de consternation se sont fait entendre. Plusieurs élus ont même pensé que l’audition leur jouait des tours, tant cet âge, 37 ans, leur paraissait extravagant. « Ça n’est pas si étonnant que cela car c’est la réalité du marché, même si j’entends que cela puisse être choquant qu’il faille, pour beaucoup de ménages, attendre la presque quarantaine pour pouvoir enfin accéder à la propriété ».

Sur le sujet de la rénovation énergétique et thermique des logements, elle a rejoint les élus qui s’inquiètent du calendrier resserré, ainsi que de la charge financière que de tels travaux supposent pour bon nombre de particuliers, notamment les personnes âgées. « 10 000 euros à la charge d’un propriétaire, ce n’est pas anodin ! ». D’où les ventes massives de passoires thermiques, dont la location va être progressivement interdite faute de travaux de rénovation. Sauf que, là aussi, les acheteurs sont de plus en plus regardants sur l’étiquette énergétique et le DPE de leur futur logement et qu’il n’est pas rare, même dans un contexte de sous-offre par rapport à la demande, de voir des acheteurs potentiels décliner un achat pour cause de DPE insatisfaisant. Concernant l’encadrement du prix du foncier, Véronique Bédague a plaidé pour un ajustement progressif, tout en reconnaissant que cette hausse découlait d’une logique : « plus le foncier se raréfie, plus son prix augmente, c’est la loi de l’offre et de la demande, il est difficile d’enrayer ce processus ».

La présidente-directrice générale de Nexity est, enfin, revenue sur la situation de la jeunesse face au logement en 2023, déplorant les difficultés croissantes auxquelles elle doit faire face. « Nous voyons de plus en plus de colocations se former faute de pouvoir ne serait-ce que louer un appartement. Même avec de bons garants, cela est de plus en plus difficile de trouver quelque chose. C’est assez terrible pour notre jeunesse ». Elle a également plaidé pour que l’accès à la propriété redevienne un objectif atteignable pour les plus jeunes : « ils n’ont pas vocation à ne s’intéresser qu’à l’usage d’un bien immobilier, ils sont tout autant légitimes que leurs aînés à devenir propriétaires d’un bien, qu’ils pourront par la suite revendre dans le cadre d’un parcours résidentiel ou bien transmettre à leurs enfants »…

Véronique Bédague plaide en faveur d'un Etat plus stratège en matière de logement