« De nombreux étudiants ont repris le chemin de l’université ce mois-ci et ils sont si nombreux que dans certaines villes européennes, il n’y a pas suffisamment de résidences pour les accueillir. Cet été, à Amsterdam, les établissements ont même demandé aux étudiants internationaux de ne pas se déplacer s’ils n’avaient pas déjà obtenu un logement. Il n’y avait tout simplement plus de chambre disponible.

La baisse de la disponibilité des résidences universitaires dans la capitale néerlandaise s’explique premièrement par une pénurie sévère de logements qui dure depuis longtemps. À cela s’ajoute l’envolée des inscriptions partout en Europe, à mesure que le souvenir de la pandémie s’éloigne et que les craintes de voir les cours interrompus par un confinement s’estompent. Aux Pays-Bas, le nombre d’étudiants à la rentrée 2021 a ainsi augmenté de 4 % par rapport à l’année précédente. Un chiffre largement au-dessus de la progression moyenne en Europe (+2,4 %), la France ayant connu pour sa part une hausse de 2,5 % sur la même période, selon le ministère de l’Education.

Cependant, la croissance du nombre d’élèves ne suffit pas, à elle seule, à expliquer l’attractivité actuelle du secteur des résidences étudiantes « purpose-buit » (PBSA). Plusieurs tendances de marché ont attiré l’attention des investisseurs cherchant à diversifier leurs portefeuilles. Alors qu’est-ce qui rend ce secteur si attractif ? Et où se trouvent les meilleures opportunités ?

Tout d’abord, notons que le secteur des PBSA s’est avéré beaucoup plus résistant qu’attendu il y a deux ans, au plus fort de la pandémie. Quand le Covid-19 a frappé, le taux d’occupation des logements étudiants a logiquement baissé de façon radicale. De nombreux investisseurs se sont alors mis à la recherche de biens saisis, en espérant les acquérir au rabais. Mais cela ne s’est finalement jamais produit et investisseurs comme prêteurs se sont préparés au pire, attendant que la tempête du Covid passe.

Les prix ont donc résisté, avec un profil de rendement qui est resté proche des niveaux d’avant crise. Dans un contexte de hausse des taux d’intérêt, l’immobilier alternatif, qui comprend les résidences étudiantes, les résidences pour personnes âgées et les micro-appartements, est devenu de plus en plus attrayant pour les investisseurs institutionnels cherchant à diversifier leurs portefeuilles et à améliorer leurs rendements.

Le logement étudiant a également bénéficié d’une forte croissance des loyers, car il échappe au cadre réglementaire qui s’applique aux loyers résidentiels et en limite l’augmentation dans la plupart des pays européens. Cela a ainsi permis aux investisseurs en PBSA de capter la totalité de la croissance de la valeur locative. Ces derniers se sont donc mis à la recherche de ce type d’actifs afin de profiter aussi rapidement que possible de ce surplus de rendement.

Le Brexit a, lui aussi, eu un impact sur le secteur. En effet, afin d’éviter de payer les frais d’inscription dans leur totalité et de devoir se soumettre à des procédures d’obtention de visa de plus en plus compliquées, les étudiants européens fuient désormais le Royaume-Uni et cherchent des alternatives ailleurs en Europe. Depuis la sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne, le nombre d’étudiants européens à Dublin a ainsi bondi de 139 %. En France, leur nombre a augmenté de 11 % entre 2015-2016 et 2020-2021, en dépit de l’effet Covid. Et les universités des Pays-Bas, d’Allemagne ou encore d’Espagne ont, pour leur part, augmenté le nombre de cours en anglais pour tirer, elles aussi, parti de ce mouvement.

Enfin, le secteur européen des PBSA bénéficie aussi des grandes tendances mondiales, telles que les changements démographiques et l’urbanisation croissante, avec des populations qui affluent de plus en plus vers les grandes villes et suivent des cursus plus longs. Il faut également s’attendre à ce que les PBSA résistent à un ralentissement économique en Europe, les données historiques montrant qu’en période de récession, le nombre d’étudiants augmente ou que ces derniers restent dans l’enseignement supérieur plus longtemps.

Bien entendu, certains marchés présentent un plus grand potentiel que d’autres. Chez Patrizia, nous nous intéressons particulièrement à l’Italie, où le marché des PBSA n’en est qu’à ses débuts. À Turin, où nous avons acquis 582 logements au cours de l’été 2022, il y a environ 107 000 étudiants à temps plein pour seulement 6 611 places disponibles en résidences, dont à peine 1 767 dans des PBSA récents. Historiquement, les logements étaient fournis par les universités ou les institutions religieuses. Or, une grande partie d’entre eux est aujourd’hui obsolète et ne répond plus aux attentes de la nouvelle génération d’étudiants.

La France représente, elle aussi, un marché attractif. Comme dans la plupart des autres pays européens, la demande en logements étudiants y est largement supérieure à l’offre, avec à peine 315 000 places disponibles en résidences à la rentrée 2021 pour près de 3 millions d’étudiants. La spécificité du marché français est qu’une majorité de ces résidences étudiantes est gérée par un même organisme public, le Crous. Les résidences privées et les PBSA représentent donc une véritable alternative pour les étudiants, ainsi qu’une véritable opportunité pour les investisseurs de capter un marché sur lequel les besoins ne cessent de croître, en particulier dans des villes de provinces où la situation est particulièrement tendue comme à Angers, Lyon ou Rennes.

Tous ces facteurs expliquent la préférence grandissante des investisseurs institutionnels pour le logement étudiant. Même si nous ne nous attendons pas à ce que la situation exceptionnelle d’Amsterdam cet été se répète ailleurs, chez Patrizia nous pensons que le soleil continuera de briller sur le secteur pendant encore un certain temps, alors que d’autres classes d’actifs luttent contre des vents défavorables ».

Geoffroy Cerez
Chairman et responsable des levées de fonds pour l’Europe du Sud
Patrizia

Geoffroy Cerez (Patrizia) : "logement étudiant, l'atout des investisseurs dans un contexte de morosité grandissante"