En 2016, l’année du lancement du concours Inventons la Métropole du Grand Paris, Woodeum n’a que trois ans d’existence, a fait de la construction tout bois sa raison d’être et a déjà la prétention de jouer dans la cour des grands. Autant les sites offerts à cette gigantesque compétition sont alors l’objet de visites très nombreuses des compétiteurs, autant les mille mètres carrés de dalle de la porte Brancion, dans le 15ème arrondissement, grimpée sur ses maigres piliers au-dessus du traffic automobile et qui sert de débarras aux encombrants des services techniques de la Ville de Paris effraient les rares candidats. Mais pas l’équipe ad hoc formée du promoteur-constructeur Woodeum, de l’architecte Cyrille Le Bihan, à laquelle se joindra assez vite l’utilisateur, la RIVP. Ils seront, finalement, les seuls à soumettre le projet qui sera retenu lauréat, en 2017. « Il fallait être fou pour imaginer construire sur un ouvrage civil à la portance proche de zéro » : c’est Julien Pemezec, le directeur de Woodeum devenu président du directoire depuis l’absorption par Altarea, qui nous l’avoue, in situ, accompagné de Fabien Cossenet, son directeur technique.

La première prouesse technique de ce bâtiment à la volumétrie relativement simple, mais néanmoins hors norme, futur Foyer de Jeunes Travailleurs et qui ouvrira bientôt ses logements et ses deux commerces en rez-de-chaussée (« Pour les JO, c’est promis » ! Promesse faite à l’attribution du permis de construire en avril 2021), réside d’abord dans la consolidation de la dalle : les tabliers du pont ont été arasés, le poids du bâtiment reposant sur les seules piles du pont et non sur la partie évidée. Un ouvrage en permanence monitoré par des capteurs de vibrations. On ne sait jamais.

La seconde prouesse réside dans la partie visible, celle des huit niveaux en bois massif, poutres et poteaux en lamellé-collé, parois et planchers en CLT (« Cross laminated timber »). Concession faite aux pompiers, une cage d’acier enferme ascenseurs et escaliers. Il faudra beaucoup d’itération, entre Woodeum et les hommes du feu, en pleine période de révision de la réglementation incendie, pour faire valoir bas carbone et légèreté. Le bâtiment sera moins lourd (400 kg/m2) que s’il avait été construit en béton (1 500 kg/m2) et les pompiers finiront par se dire – en privé – plutôt rassurés par le bois. Cinq ans après sa conception, « Hosta » affiche des perfor- mances encore supérieures à toutes les normes techniques exigées par la réglementation. Le couple d’ingénieurs Pemezec/Cossenet – ils se sont connus chez Bouygues, leur précédent employeur –, deux « fous » (c’est eux qui le disent) de technologie et d’innovations, personnalisent la singularité de Woodeum, un constructeur qui affecte jusqu’au tiers de ses effectifs à la recherche et au développement. Mais comment rendre vivable un tel ovni, aussi singulier qu’« Hosta », perché au-dessus du bruit et de la pollution ? Il a fallu concevoir une façade épaisse, une double peau métallique sur trois des côtés. La quatrième façade est, elle, munie de vitres renforcées qui ne s’ouvrent pas, pour des raisons évidentes de sécurité, mais éclairent jardins d’hiver et espaces de vie communs, avec vue plongeante sur le « périph » en contrebas : un effet de transparence dedans-dehors étonnant, dans un confort qu’assure la méthode E.C.R.A.I.N.S., tout juste développée avec l’Ademe, et portant sur la qualité de l’air intérieur QAI.

Il fallait voir, ces derniers jours, avec quelle gourmandise Alain Taravella et Jacques Ehrmann, les président et directeur général du groupe Altarea, enregistraient l’impatience des futurs occupants et quelque chose comme de la fierté complice des riverains de Vanves et de Paris, pour saisir ce que le qualificatif d’« immeuble démonstrateur » veut dire. Et donc reproductible. En ligne de mire, ils en parlent, les voie ferrées et les gares qui coupent bien souvent les métropoles en deux…

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« Hosta », Paris 15ème (Woodeum) : "au-dessus !"